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Lubeck, de Constance, de Spire, de Worms, d’Erfurt, de Cologne, de Francfort, etc., des lettres toutes remplies de ses protestations à ce sujet et des assurances de son amitié. « Nous avons toujours eu, leur disait-il, les villes impériales pour très chères, et avons affectueusement permis à leurs citoyens de commercer en liberté et en sûreté dans notre royaume et dans nos domaines héréditaires. Nous les y avons traités avec autant de faveur que s’ils étaient nos propres sujets et les y avons comblés des plus amples privilèges, comme nous avons la confiance qu’ils n’hésiteront pas à vous l’affirmer, s’ils sont interrogés à cet égard. C’est pourquoi nous ne pouvons pas supporter sans un grand déplaisir qu’on ait répandu en Allemagne, ainsi que nous l’avons appris, le bruit que nous avons aidé avec de l’argent et des armes ceux qui se sont déclarés les ennemis des villes impériales et qui les ont attaquées. Nous avons été si loin de le faire et nous en avons peu la pensée, que, dans le présent état des choses, si nous avions à entrer en guerre, ce serait pour vous et pour le saint-empire que nous prendrions les armes plus volontiers que pour qui que ce soit. Ainsi devez-vous l’attendre et vous le promettre de nous à cause de notre ancienne amitié et de l’alliance qui nous a été jusqu’à présent chère et sacrée[1]. »

Mais cette démarche de François Ier ne servit de rien : le mal était fait. Vainement refusa-t-il de s’entendre avec le duc Ulric, qui lui envoya un homme de sa confiance[2], et s’abstint-il même d’intervenir comme arbitre entre lui et la ligue, à l’exemple de l’électeur palatin, qui, en sa qualité de vicaire de l’empire, avait tenté de pacifier cette querelle : l’on ne tint compte ni de son désaveu ni de sa réserve. Ce qu’il y eut de pis pour lui, c’est qu’à l’irritation produite par cette alliance supposée s’ajouta bientôt le discrédit d’une défaite.

L’armée des confédérés s’était mise en campagne à la fin de mars. Elle avait le bon droit, la passion et la force pour elle; aussi envahit-elle le Wurtemberg sans rencontrer de résistance. Elle entra, presque au début des hostilités, dans Stuttgart, et le 21 avril elle s’empara de Tubingue, où s’étaient enfermés les enfans du duc Ulric, qui se réfugia dans le comté de Montbelliard en attendant des temps meilleurs. Le 24 mai, Asperg, dernière forteresse du duché, tomba entre les mains des confédérés de Souabe, dont l’armée resta à la dévotion du roi catholique.

Ce qui avait rendu si prompt et si complet le désastre du duc de Wurtemberg, c’était l’abandon où l’avaient laissé les quatorze mille

  1. Lettres sur parchemin signées du roi et contre-signées de Robertet. Archives, carton J. 952, pièces 30, 32, 33, 34, 35, 36, 37.
  2. Lettre de François Ier à ses ambassadeurs, du 21 mars. Mss. de La Mare, n° 10330/3, f° 66.