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délégué de son jeune souverain à la diète. Les deux voix de Cologne et de Saxe étant incertaines, il restait encore beaucoup à faire de part et d’autre pour obtenir une majorité définitive.

On y travailla des deux côtés avec ardeur. Sickingen parut aux environs de Francfort avec plus de vingt mille hommes de l’armée de Souabe, ce[1] dont furent merveilleusement estonnez ceux qui vouloient bien au roy de France et très fort joyeux ceux qui vouloient bien au roy catholique[2]. Afin d’ajouter à l’influence exercée par la vue de ces troupes l’action de leurs sourdes menées, le comte palatin Frédéric, l’évêque de Liège, le margrave Casimir de Brandebourg-Culmbach, le comte Henri de Nassau et Maximilien de Berghes s’établirent à Höchst, à deux lieues de Francfort, tandis que les autres agens du roi catholique demeurèrent à Mayence. Bonnivet s’était transporté depuis quelque temps de la Lorraine sur les bords du Rhin, avec un cortège de huit cents chevaux. Afin d’être plus près des électeurs et d’agir, autant qu’il le pourrait, sur eux, il se rendit alors déguisé, et sous le nom du capitaine Jacob, à Rüdesheim, village situé à cinq ou six lieues de Francfort, laissant Jean d’Albret et le président Guillart à Coblentz,


IX.

La diète s’ouvrit le 18 juin. Aux termes de la bulle d’or, les électeurs entendirent, dans l’église de Saint-Barthélémy, la messe du Saint-Esprit qui devait inspirer leur choix[3]. Après la messe, ils s’approchèrent tous de l’autel, et là les trois archevêques de Mayence, de Trêves, de Cologne, la main sur la poitrine, le comte palatin, le duc de Saxe, le margrave de Brandebourg et le nonce du roi de Bohême, la main sur le livre des Évangiles, ouvert au premier chapitre de saint Jean, in principio erat Verbum, etc., prêtèrent chacun à son tour le serment qui suit : — « Je jure, sur les saints Évangiles ici présens et placés devant moi, que je veux, par la foi qui me lie à Dieu et au sacré empire romain, élire, selon mon discernement et mon intelligence et avec l’aide de Dieu, pour chef temporel du peuple chrétien, c’est-à-dire roi des Romains, futur césar, celui qui convient le mieux à cette charge, autant que mon discernement et mon intelligence me dirigent et me commandent, conformément à ma foi, et que je lui donnerai ma voix, mon vote, et mon susdit

  1. Instructions données par le roy François Ier au duc de Suffolk. Mss. Colbert, vol. 385, p. 1.
  2. Mémoires de Fleuranges, dans Petitot, vol. XVI, p. 342. « Jamais ne fismes mieulx que de nous fortifier de ceste année, laquelle nous faisons marcher. » Lettre d’Armerstorff à Marguerite d’Autriche, du 2 juin. Archives de Lille.
  3. Bulle d’or, cap. II, art. 1er .