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traîne-t-elle celle de tous les autres ? On a reproduit, pour les indications données par le mouvement des tables, toutes les hypothèses avancées pour expliquer les divinations ou prétendues divinations magnétiques. Ici les phénomènes plus dégagés des influences nerveuses semblent devoir se mieux prêter à la constatation des faits possibles. Le fait fondamental lui-même, savoir la grande énergie des mouvemens naissans, soit volontaires, soit insensibles, est très curieux, et en même temps qu’il semble expliquer tout ce qu’il y a d’explicable dans le phénomène général, il sert de confirmatiou à tout ce que la mécanique et la physiologie nous avaient déjà appris.

Des esprits fort sensés étaient d’avis qu’au lieu de s’étonner que l’imposition des mains produisît du mouvement, on s’étonnât plutôt des cas, s’il en existe, où des organes essentiellement mobiles auraient pour ainsi dire communiqué le repos. On leur répondra que la question ici n’est pas de savoir pourquoi il se produit du mouvement, mais bien de savoir comment ce mouvement se transmet des organes aux corps mobiles. Or c’est à cela que sert notre théorie des premiers mouvemens et de leur extrême énergie à l’origine.

Nous avons dit plus haut que nous examinerions la question célèbre du mouvement considéré dans sa production et dans sa durée, et par suite la question du mouvement perpétuel. De même que nous ne pouvons rien admettre de contraire à la logique dans le monde des idées, de même nous ne pouvons rien admettre de contraire à l’expérience dans le monde matériel. Or voici ce que nous apprend la science expérimentale.

Tout corps, toute substance matérielle ne peut elle-même se donner du mouvement ou s’en ôter. Ce n’est qu’en recevant du mouvement des corps étrangers ou eu leur communiquant une partie du sien qu’un corps gagne ou perd de la vitesse. La somme totale du mouvement qui est dans le monde est inaltérable, puisqu’un être matériel quelconque ne peut accroître le sien qu’aux dépens des corps environnans, ni en perdre sans le restituer aux corps sur lesquels il réagit. Si nous voyons sur la terre tous les mouvemens abandonnés à eux-mêmes s’arrêter promptement, c’est que la communication du mouvement à l’air environnant, aux supports et surtout aux objets que l’on travaille ou que l’on façonne, enlève une partie du mouvement renfermé primitivement dans le corps, et cette déperdition le ramène bien vite au repos. Dans les espaces célestes, où les astres ne rencontrent aucun obstacle et où par suite cette déperdition n’a pas lieu, les mouvemens se perpétuent indéfiniment. Il est tout autant au-dessus du pouvoir de l’homme de créer du mouvement sans force que de tirer du néant des corps matériels. Une vitesse d’un mètre par seconde est aussi impossible à donner à une enclume de cinq cents kilogrammes, sans qu’on y touche, qu’il l’est de faire naître cette enclume elle-même sans fouiller la terre et réduire le minerai en fer.

Il suit de là que, puisqu’il y a toujours perte de mouvement pour un corps terrestre qui se meut à travers mille obstacles et que rien ne restitue à ce corps les pertes qu’il a faites, le mouvement perpétuel est impossible.

Apprenons donc de l’expérience à distinguer le possible de l’impossible, et