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en état de servir pendant 64 heures. Il est digne de remarque que la propriété fécondante disparaît d’abord dans la portion de l’organe mâle où le liquide est le plus complètement élaboré, et qu’elle persiste encore quelque temps après dans les parties profondes.

L’ensemble de ces faits explique la plupart des insuccès survenus à la suite d’opérations en apparence bien conduites. Ils montrent que les manœuvres doivent s’effectuer avec une extrême célérité, et qu’on doit tenir un très grand compte de la température de l’eau. On peut en conclure aussi que l’époque du frai dans certaines localités doit varier en raison des phénomènes atmosphériques, que la courte vitalité de la laitance estime des causes qui s’opposent au croisement des espèces dans la nature, et que l’instinct jusqu’alors inexpliqué qui porte les truites et les saumons à remonter vers la source des cours d’eau tient au besoin qu’éprouvent ces animaux de trouver un degré de température convenable à la fécondation et au développement de leurs œufs. M. de Quatrefages a encore déduit de ses recherches des données d’une grande valeur pour la pratique et éminemment propres à régulariser les méthodes de fécondation artiflcielle[1]. Les résultats contenus dans le mémoire de M. de Quatrefages impriment à ces méthodes la rigueur scientifique dont elles manquaient jusqu’alors, et ils tendent à doter la pisciculture de règles fixes et précises.

Pour compléter le tableau sommaire des progrès que la pisciculture a accomplis depuis l’antiquité jusqu’à nos jours, et faire connaître l’état actuel de cette industrie, il nous reste à signaler les perfectionnemens nombreux et importons qui sont dus à M. C. Millet, inspecteur des eaux et forêts[2].

  1. Puisque le liquide mâle, complètement élaboré, perd le premier ses propriétés fécondantes, on ne devra employer dans les cas douteux que celui qu’on exprime des laitances elles-mêmes. La vitalité des animalcules n’étant pas détruite par le froid dans l’intérieur de l’organe mile, il ne faudra pas rejeter comme inutiles les laitances gelées. Si la fécondation ne peut être opérée qu’après la mort de l’animal, il est bon d’enlever les laitances et de les conserver dans un linge mouillé. En raison de l’extrême brièveté de la vie des animalcules et de l’obstacle que le gonflement de l’enveloppe peut apporter à la fécondation, il est utile pour certaines espèces de faire couler simultanément dans le même vase les œufs et le produit mâle et de rendre ainsi le contact instantané. On s’abstiendra toujours de laitancer l’eau à l’avance.
  2. Rapport au directeur général des eaux et forêts sur le repeuplement des cours d’eau navigables et flottables, par M. de Saint-Ouen, administrateur des forêts, mars 1853 (autographié). — Annales forestières, p. 272 et 429, juillet et août 1853. — Indépendamment des divers mémoires sur la pisciculture que nous avons cités jusqu’ici, on consultera encore avec profit le rapport d’une commission du roi de Hollande ayant pour titre : Handleiding tot de Kunstmatige Vermenigvuldigen van Visschen, 1833 ; des notes de M. de Caumont dans l’Annuaire normand pour 1850, et dans le même recueil un Essai sur la multiplication des poissons dans le département de la Manche, par M. G. Sivard de Beaulieu, 1854, de même que des lettres de M. le marquis de Vibraye et de M. le comte de Pontgibaud, 1854 ; dans le Précis analytique des travaux de l’Académie de Rouen, une note de M. Bergasse sur la fécondation artificielle appliquée au saumon, 1853, et des Recherches sur l’histoire naturelle du saumon, par M. A. Bignon, 1853 ; enfin diverses observations de MM. Géhin, Richard, de Behague, dans le Bulletin de la Société d’agriculture de Paris, t. VI, p. 461 et 469, 1851, de M. Noblet, ibid., t. VII, p. 403,1852, et de M. Quenard, ibid., t. VIII, p. 95,1853.