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et royale apostolique pour le régime intérieur de ses provinces italiennes. »

Cette pensée a été si constamment fidèle à elle-même, qu’en 1824, à la mort du grand-duc de Toscane Ferdinand III, le ministre autrichien à Florence, le comte de Bombelles, demandait que l’exaltation au trône du nouveau souverain n’eût point lieu sans un concert préalable avec le cabinet impérial. Partout où éclate une étincelle, les forces de l’Autriche sont en marche ; de là ces interventions qui se sont succédé à divers intervalles à Naples, dans les États-Romains, en Toscane, à Modène et dans le Piémont lui-même : politique, au reste, sanctionnée un moment par l’Europe de la sainte-alliance à Laybach ! Lorsque l’empereur François Ier allait visiter sous la restauration ses provinces de la Haute-Italie, lorsque son successeur, l’empereur Ferdinand, allait en 1838 se faire couronner à Milan, ces voyages, en montrant les princes italiens empressés autour du maître impérial de la Lombardo-Vénétie, n’avaient d’autre but que d’accoutumer les peuples et l’Europe elle-même à ce spectacle du protectorat autrichien. Le prix de cette subordination des princes italiens vis-à-vis de l’Autriche, c’était la sécurité promise aux trônes, l’appui des forces impériales assuré aux gouvernemens menacés, la garantie contre toute tentative révolutionnaire. L’Autriche au-delà des Alpes, c’était la domination étrangère forcément envahissante et la représentation armée de toutes les traditions d’immobilité politique. Il en résulte que, dans les autres états italiens, tous les hommes dévoués aux doctrines absolutistes, à la monarchie pure telle qu’elle existait avant 1789, ont eu des inclinations autrichiennes plus ou moins déguisées, et que, d’un autre côté, il y avait une affinité naturelle entre ceux qui poursuivaient l’indépendance de l’Italie et ceux qui méditaient ses progrès politiques intérieurs. C’est dans cette situation, observée au double point de vue des mouvemens d’opinion légués par la révolution française et des antagonismes dont les traités de 1815 cachaient le germe, qu’est le secret du travail contemporain de l’Italie et de ses complications. Une multitude de nuances se feront jour sans doute dans le jeu des partis et des hommes ; mais là, dès l’origine, est le principe de toutes les luttes.

Le Piémont offrait, dès 1815, un théâtre particulier au développement de cette situation. Qu’arrive-t-il en effet ? A peine la monarchie piémontaise est-elle restaurée, une sorte de courant fatal de réaction semble emporter les esprits au milieu d’un pays qui, tout en se replaçant avec entraînement sous le sceptre de la maison de Savoie, avait vu cependant depuis quinze ans son existence se transformer, l’égalité civile pénétrer dans ses mœurs, une administration plus simple présider à ses intérêts. L’almanach de la cour de 1798 est