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de les modérer et de les contenir ; mais lord Castlereagh, qui en était informé, n’y voyait que des inconvéniens. « Je n’attends pas beaucoup de bien, écrivait-il, de la négociation secrète de Metternich à Paris, et je ne voudrais pas m’y mêler. Le moins qu’un ministre anglais peut avoir à faire avec la politique de Monsieur, c’est le mieux. »

Cependant les manœuvres des ultra-royalistes, favorisées par les symptômes d’une certaine agitation qui commençait à se manifester en France, n’avaient pas été absolument sans résultat. L’Autriche et la Prusse, inquiètes de ces symptômes, peu bienveillantes d’ailleurs pour le gouvernement du roi, peu empressées à lui rendre son indépendance et sa liberté d’action, inclinaient a prolonger l’occupation. Leurs hésitations durent céder à la volonté de l’empereur Alexandre, dont le bon vouloir éclata d’autant plus en cette circonstance qu’il n’était pas lui-même complètement rassuré sur les conséquences de la retraite des forces alliées. Il eût désiré que l’armée d’occupation, en quittant le territoire français, fut pendant quelque temps maintenue sur pied en Allemagne pour être prête à tout événement ; mais cette combinaison, qui tendait en quelque sorte à remplacer l’occupation de la France par celle de l’Allemagne, ne pouvait convenir aux deux grandes cours germaniques. Il fallut y renoncer, et grâce à la patriotique insistance du duc de Richelieu, fortement appuyée auprès du monarque russe par son envoyé, M. Pozzo di Borgo, et par son secrétaire d’état, le comte Capodistrias, dont les tendances libérales balançaient alors avec avantage la politique autrichienne du comte de Nesselrode, grâce aussi aux bons offices du duc de Wellington, qui, dans tout le cours de cette grande affaire, se montra constamment favorable à la France, l’évacuation pure et simple du territoire français fut résolue. Déjà une convention, préparée aussi par l’influence de l’empereur Alexandre et conclue sous la bienveillante médiation du duc de Wellington, venait de restreindre dans des limites fixes les répétitions pécuniaires que les sujets des puissances élevaient contre le gouvernement français en vertu du traité du 20 novembre, et qui menaçaient de prendre des proportions auxquelles personne ne s’était d’abord attendu. Pour compléter la libération de la France, pour lui rendre son indépendance et la replacer au rang des puissances appelées à influer sur toutes les grandes affaires de l’Europe, il y avait quelques arrangemens à prendre, quelques formalités à accomplir. On pensa que c’était le cas de recourir à une de ces réunions de cabinets prévues par le traité que l’Angleterre, la Russie, l’Autriche et la Prusse avaient conclu le 20 novembre, le jour même de la signature du dernier traité de paix. Les deux empereurs et le roi de Prusse se rendirent donc à Aix-la-Chapelle dans le courant du mois de septembre 1818.