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Vois-tu la grenade et l’orange ;
Vois-tu ces fruits à forme étrange
Rouler autour de nos pieds nus ?
Cueillons-les ! et, plus loin encore.
Cherchons, aux lieux d’où vient l’aurore,
Des enivremens inconnus.


LES ROSES.

Le soleil a bu dans la rose
Les pleurs dont le matin l’arrose ;
Il enlève aux boutons charmans
Le poids de leurs frais diamans.

Mille fleurs, heureuses d’éclore.
S’ouvrent au feu qui les colore ;
Un zéphyr passe et fait larcin
Des parfums cachés dans leur sein.

Il s’en va partout les répandre.
Ces parfums qui font le cœur tendre ;
Avec lui l’enivrant poison
Vole aux deux bouts de l’horizon.

Il n’est, au loin, sous la verdure,
Une âme si fière et si dure
Où l’amour, en sa folle ardeur.
N’entre avec la subtile odeur.

Si tu ne veux qu’elle t’enivre.
Il ne faut respirer ni vivre ;
Il faut fuir l’odeur du rosier
Et son poète au doux gosier.

Fuis cet air que l’été respire ;
Fuis cette chanson qu’il soupire ;
Fuis vers ces monts toujours couverts
Du neigeux manteau des hivers.


ADAH.

Pour vous, ô mon frère ! ô mon maître !
J’abandonne, à jamais peut-être.
Ma mère et nos dieux offensés.
Je vais, dans mon idolâtrie,
Sans nom, sans autel, sans patrie…
Mais si tu m’aimes, c’est assez.