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Mademoiselle de Kerdic.

Ah ! tant mieux ! merci bien. Il y a en vous de bons restes, allons.

François. (Il jette du bois au feu, et se dirige vers le fond, emportant la lanterne et le manteau ; près de sortir, il se retourne.)

Eh ! eh ! soyez sages, jeunes gens. (Il sort.)



Scène X.

LE COMTE, MADEMOISELLE DE KERDIC.
Le Comte.

Vous êtes gardée là par un vrai dragon, mademoiselle.

Mademoiselle de Kerdic, riant.

Son service, à ce titre, comme à tous les autres, n’est pas fatigant. Les trésors de mon âge se gardent tout seuls.

Le Comte.

Cela prouve que les gens de goût sont rares en ce pays.

Mademoiselle de Kerdic.

N’allez pas essayer de me faire croire, par hasard, qu’on pourrait être amoureux de moi ?

Le Comte.

Ma foi !… Vous devez avoir été bien jolie !

Mademoiselle de Kerdic, prenant sa tapisserie.

Oui… du temps que la reine Berthe filait… Vous ne vous asseyez pas ? (Elle s’assoit.)

Le Comte.

Non. (Il soupire.) Il est réellement impossible que j’abuse plus longtemps de votre hospitalité… (Il passe la main sur son front, qui s’est assombri, et quitte la cheminée.) Allons !

Mademoiselle de Kerdic, qui suit d’un regard plein d’angoisse tous les mouvemens du comte.

Et… où allez-vous ?

Le Comte.

Je… je ne sais trop… Mais ne craignez pas que j’attache au pays que vous habitez quelque souvenir affligeant… ne le craignez pas…

Mademoiselle de Kerdic, d’une voix basse.

Merci.

Le Comte. Il va prendre son chapeau et sa canne ; comme il passe près du piano, il dit en affectant l’insouciance.

Est-ce que vous jouez du piano ?

Mademoiselle de Kerdic.

Un peu.

Le Comte, s’inclinant.

On n’est point parfait. (Il prend son paletot sur une chaise, puis, se rapprochant de mademoiselle de Kerdic, qui s’est levée et qui le regarde avec curiosité, il lui baise la main.) Mademoiselle,