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soin et une entière absence de tout préjugé. Il apprécie les ressources naturelles du pays, et résume cette appréciation, au point de vue pratique, de la manière suivante :


« Considéré dans son ensemble, ce vaste empire est supérieur aux autres pays par l’excellence de ses eaux, la salubrité de l’air, la douceur du climat et le caractère tempéré des indigènes. Il est cultivé dans toute son étendue, et si peuplé, qu’on ne peut faire un côss (deux milles) sans rencontrer des villes, des villages et de bonne eau. Même au cœur de la saison froide, la terre est couverte de verdure, les arbres conservent leur riche feuillage, et pendant la saison des pluies, qui commence vers le mois de juin dans la plupart des provinces de l’Hindoustan et dure jusqu’en septembre, l’air est si délicieux, qu’il rend à la vieillesse la vigueur du jeune âge. Les Hindous, pris en général, sont religieux, polis envers les étrangers, d’un caractère affable et gai, avides de savoir, enclins aux austérités ascétiques et à la vie retirée, cependant éminemment propres aux affaires….. Ennemis, redoutables, ils sont amis fidèles….. Soldats intrépides, ils sont toujours prêts à faire le sacrifice de leur vie quand on les pousse au désespoir, ou celui de leur fortune, de leur réputation et au besoin de leur existence à un ami, ou même à un étranger dans le malheur, quand il a réclamé leur protection[1]. »


Tel était le pays, tels étaient les peuples sur lesquels Akbăr réussit le premier à établir une domination durable. Voyons maintenant à quelles conditions s’installa cette domination.

Dès le commencement de son règne, Akbăr donna une attention particulière à l’administration territoriale : ce ne fut cependant que vers la quinzième année de ce règne, qui dura un demi-siècle, qu’avec raide du radja Tăder-Măll et de Mouzăffer-Khân, Akbăr étudia les bases antiques du revenu foncier dans l’Hindoustan, et y introduisit les modifications que les circonstances nouvelles dans lesquelles le pays était placé indiquaient à sa haute intelligence. Des divisions territoriales mentionnées par Mânou, celle qui embrassait cent grâmas ou communes était la seule qui se fût conservée à peu près dans les conditions primitives du système hindou de gouvernement. Elle était connue, et l’est encore, sous le nom de parganneh. Le premier chef ou magistrat du parganneh, est toujours désigné dans le Dăkkhăn sous le nom de desmak ou dessaï. et dans l’Hindoustan sous celui de tchaoderi. L’officier comptable s’appelle despandi, et l’officier percepteur kanoungo[2].

  1. Ceci se rapporte particulièrement à la classe militaire et surtout aux Radjpouts, dont Abou ’l-Fad exalte en plus d’un endroit le noble et chevaleresque caractère.
  2. Nous trouvons dans les temps anciens les désignations suivantes appliquées aux autorités chargées de l’administration territoriale : bhoumer-adhipati, souverain seigneur de la terre ; — dsâdhipati, gouverneur d’un district ; — grâmâdhipati, chef de village ou de commune. Ces mots se retrouvent encore aujourd’hui à Java avec les mêmes significations ou à peu près.