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l’insurrection ont eu à subir les ravages de leurs prétendus amis, et, avant que Fuad-Effendi eût pu réunir des forces régulières suffisantes, les terribles représailles des Albanais. Quelquefois même, comme à Mezzovo, où Théodore Grivas fut traqué et mis en fuite par les Turcs, les deux fléaux se sont abattus simultanément sur eux. L’aventure de Mezzovo est en raccourci toute l’histoire de l’insurrection. Cette ville avait été poussée à se soulever par les intrigues du consul grec de Janina, M. Rosetti. Grivas, poursuivi par Abdi-Pacha, s’y réfugia. Il commença par extorquer des habitans une énorme contribution. Quand il apprit que les Turcs approchaient, il rassembla toutes les femmes et tous les enfans dans une église, où il les enferma sous prétexte de les protéger, puis il envoya ses palikares dans les maisons désertes pour y aller prendre les bijoux et tous les objets de quelque valeur. Le butin ramassé, il mit le feu au quartier de la ville où il s’était retranché, et s’enfuit. Les Albanais, en arrivant, s’emparèrent de ce que les palikares n’avaient pu emporter. Aussi les habitans de ces malheureuses provinces se hâtaient-ils de faire leur soumission aux autorités musulmanes sous le patronage des agens consulaires d’Angleterre et de France ; on en vit même marcher avec les troupes ottomanes contre l’insurrection. Quant aux chefs grecs, également incapables de commander et d’obéir, divisés par d’irréconciliables rivalités, ils n’ont pu tenir contre les Turcs, et les rodomontades des sectaires de la grande idée et de MM. Panaghioti Soutzo et Bambas ont abouti à ces lettres de Grivas et de Tzavellas, qui révélaient d’une façon si flagrante la complicité du gouvernement, en demandant des secours, de l’argent, un chef, et en proclamant l’impuissance radicale de l’insurrection. Quand ces demandes, que tout le monde a lues, arrivèrent à Athènes avec la nouvelle des désastres des insurgés, de nombreux conseils firent réunis au palais sous la présidence du roi. Tous les instigateurs importans du mouvement y assistaient. M. Metaxay siégeait à la gauche du roi Othon. Dans cette situation désespérée, on agita la question de la coopération directe du roi et de son entrée en campagne à la tête de l’armée ; le général Spiro Milio, aide de camp du roi, et le ministre de la guerre, Scarlato Soutzo, conseillèrent de prendre ce parti. Plus politique, M. Metaxa combattit cette résolution extrême. Il conseillait d’éparpiller les forces insurgées en bandes de guérillas, et, laissant la frontière et les places fortes en arrière, de les répandre dans le nord de la Thessalie et de la Macédoine. Le prince Jean Soutzo, secrétaire de la légation grecque à Saint-Pétersbourg, et qui venait d’arriver à Athènes, appuyait ce plan, approuvé, disait-il, par l’empereur Nicolas. Il affirmait que l’insurrection ainsi conduite pourrait tenir pendant deux ans, se communiquer à tout l’intérieur de la Turquie