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savaient parler la langue de Tacite et de Quintilien ; l’Angleterre elle-même ne resta point étrangère à cet essai de renaissance classique : nous avons remarqué, parmi les importations latines de la muse anglaise qui figurent dans le recueil, des vers de M. Allan Cuningham sur la gloire littéraire de la France, et une satire du célèbre ministre Canning sur la manie de médire qui est commune aux vieilles filles.

L’Hermes Romanus a été chez nous le dernier des journaux romains. Depuis la disparition de ce recueil, la critique et la philologie latine se sont dispersées dans diverses publications, où elles n’occupent en général qu’une place secondaire. Nous citerons au premier rang le Journal des Savans, où diverses questions de littérature et de philologie romaine ont été traitées avec une grande érudition et une éminente sagacité critique par MM. Daunou, Naudet et Patin. Le Journal de l’Instruction publique, fondé en 1832, sous le ministère de M. de Montalivet, contient aussi, à côté des actes officiels de l’administration, une partie critique intéressante, ainsi que les comptes rendus des cours de la Sorbonne et du Collège de France. Il y a là une foule de renseignemens précieux, une mine féconde pour les études sérieuses, et si les éditeurs ou les traducteurs des classiques se donnaient la peine de chercher, pour les mettre en circulation dans leurs livres, les richesses qui s’y trouvent enfouies, il en résulterait sans aucun doute un véritable progrès. La Revue de l’instruction publique, fondée en 1842 par M. Hachette, et dont la collection forme aujourd’hui onze volumes in-8o, contient également de bons articles, surtout en ce qui touche la critique des livres scolaires. La Revue archéologique traite aussi avec succès les questions romaines, et l’on y trouve pour l’épigraphie latine d’utiles renseignemens : il en est de même des Mémoires de la Société des antiquaires ; mais ces deux recueils ne s’occupent en général que des inscriptions lapidaires ou monumentales, et nous regrettons vivement que le recueil fondé en 1845, par M. Léon Renier, sous le titre de Revue de philologie, de littérature et d’histoire ancienne, ait cessé de paraître après deux années d’existence. Ce recueil en effet avait rallié les philologues et les antiquaires les plus éminens, et en se plaçant dès l’abord en dehors et au-dessus de l’influence de toutes les coteries qui s’agitent dans le monde savant, il avait su se faire écouter parce qu’il parlait avec autorité. Recueil vraiment encyclopédique dans sa spécialité, elle publiait tout à la fois des morceaux inédits des écrivains grecs et latins, des critiques et des restitutions de textes, des inscriptions, des examens d’éditions et des traductions classiques, etc. Des philologues allemands qu’un long séjour et d’éminens travaux ont naturalisés chez nous, MM. Fix et Dübner, s’y trouvaient associés aux maîtres de l’érudition française, MM. Letronne, Littré, L. Quicherat, etc. Nous citerons entre autres, comme de véritables modèles, l’examen du livre de M. Leclerc, Des Journaux chez les Romains, par M. Dübner, l’article de M. Renier sur la traduction de Dion Cassius, par M. Gros, et diverses interprétations ou restitutions de textes qui rappellent la critique des érudits du XVIe siècle et leur patiente méthode d’analyse, où tous les mots étaient pesés. Il est à regretter qu’une publication aussi intéressante que la Revue de philologie n’ait pu se soutenir, alors même qu’elle réunissait toutes les conditions du succès ; mais elle avait malheureusement encouru, de la part même