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ainsi dire de lien entre l’effet obtenu et la cause que l’on veut apprécier, on peut s’arrêter aux deux phénomènes extrêmes et dire : Quand la chaleur arrive sur une des faces de la pile, l’aiguille aimantée du galvanomètre se déplace, et le moyen de constater et de mesurer la chaleur qui tombe sur la pile, c’est de constater et de mesurer le déplacement qu’elle imprime à l’aiguille aimantée.

Melloni, nous l’avons dit, n’avait point inventé cet appareil : il le devait à Nobili; il n’avait point découvert l’influence de l’électricité sur l’aiguille aimantée : c’est OErsted qui l’avait reconnue le premier; mais il sut, en s’emparant de résultats jusqu’alors inutiles, créer des applications qui n’étaient point soupçonnées. Il ne recula ni devant les dépenses lourdes que nécessitaient des essais nombreux, ni devant l’ennui de tentatives souvent stériles. Il rencontra des artistes ingénieux qu’il forma et ne découragea point; il donna à son appareil une forme élégante et presque coquette. A chaque besoin des expériences, il fit correspondre un mécanisme qui les facilite et les mesure; il s’attacha surtout à obtenir une sensibilité extraordinaire, et il y réussit au point qu’elle gêne les expérimentateurs moins habiles qu’il ne l’était lui-même. Melloni avait doté dès lors la physique d’un œil qui voit la chaleur, qui peut en accuser les plus insensibles traces et en mesurer toutes les variations; il ne fallait plus que de la patience pour en étudier toutes les lois. : Melloni se mit à l’œuvre.

Veut-on démontrer que la chaleur se propage avec une grande vitesse, on dispose la pile dans une chambre vis-à-vis d’une lampe que l’on couvre d’abord par un écran : au moment même où l’on enlève cet obstacle, l’aiguille se met en mouvement. Un thermomètre n’aurait commencé ses indications dans un essai semblable qu’au bout d’un temps assez long. Veut-on savoir si le rayonnement se transmet à travers les corps transparens, on intercale entre la lampe et la pile ou un carreau de verre, ou une lame de glace, ou une petite caisse de verre remplie d’eau froide, et cette expérience, conduite comme la précédente, accuse à l’instant la transmission de la chaleur à travers le corps interposé.

L’appareil imaginé par Nobili, mais perfectionné par Melloni, se prête, on le voit, aussi bien que les anciens instrumens thermométriques à montrer que la chaleur se propage, se réfléchit, se transmet, se réfracte comme la lumière; mais il a sur eux des avantages précieux, il a des mouvemens tellement subtils, que l’on ne peut apprécier aucun intervalle entre le moment où le rayon est lancé et celui où son effet se montre. Il a tellement de précision dans ses indications, que si l’on agite périodiquement la flamme d’une bougie qui l’influence, on voit périodiquement se déplace» l’aiguille; il a tant de sensibilité, que les moindres courans d’air, les rayonnemens calorifiques les plus imperceptibles sont indiqués par les effets qu’ils