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coupole de San-Giovanni, mais peut-être ne réunit-elle pas au même degré l’élégance, le savoir, l’élévation et la pureté. C’est parmi les historiens de la peinture une opinion accréditée, que ce dernier travail est supérieur au premier. Cependant je crois qu’il est permis de ne pas se rallier à cette opinion, et qu’on peut, sans tomber dans le paradoxe, maintenir les droits de San-Giovanni. Ce n’est pas que le prétende signaler un affaiblissement dans le talent de l’auteur entre les années 1526 et 1530, une telle prétention ne saurait se justifier; mais je ne trouve pas dans la coupole de la cathédrale une seule figure qui me semble comparable aux évangélistes et aux docteurs de San-Giovanni : c’est à ces termes que se réduit ma pensée. J’admire, comme tous les hommes de bonne foi, l’abondance et la variété qui éclatent dans la coupole de la cathédrale, je reconnais avec tous les esprits éclairés qu’un génie de premier ordre a pu seul enfanter une telle composition; mais quelle que soit la vivacité de mon admiration, je suis bien obligé de confesser qu’Antonio n’a pas conçu l’Assomption de la Vierge aussi simplement que l’Ascension du Christ. Le regard le plus attentif ne suit pas sans effort l’ordonnance de ce poème. A parler franchement, il semble même que l’auteur n’ait pas songé à l’ordonnance. Pour ma part, je ne crois pas qu’il l’ait négligée; toutefois il faut reconnaître qu’il n’a pas mis dans l’expression de sa pensée la clarté qui ajoute tant de prix aux plus beaux ouvrages. Les anges, les docteurs et les martyrs qui reçoivent la Vierge dans le ciel offrent aux peintres d’innombrables sujets d’étude. Envisagée au point de vue technique, la coupole de la cathédrale ne saurait être louée trop vivement. L’auteur a multiplié les problèmes les plus ardus pour se donner le plaisir de les résoudre; il ne recule devant aucune difficulté. Je reconnais, avec tous les hommes du métier, que son audace lui Porte bonheur; il se joue des obstacles et paraît à peine en avoir conscience, tant il demeure puissant et varié; mais ces figures si facilement inventées n’offrent pas toujours des lignes heureuses. Il y a d’ailleurs dans les raccourcis une ostentation qui frappe tous les yeux. Je laisse aux érudits en cette matière le soin de décider si le Corrège a surpassé Melozio dans la perspective verticale; je me contente de déclarer que la science et l’art ne sont pas pour moi une seule et même chose. En peinture comme en statuaire, la science est un moyen de toucher le but, et non le but même. Or, dans la coupole de la cathédrale, le Corrège me paraît avoir confondu plus d’une fois le but et le moyen. Cependant, malgré ces réserves, je comprends sans peine l’admiration et la sympathie qui s’attachent à l’Assomption de Parme; car si l’on consent à ne pas se préoccuper de l’ordonnance, on se laisse facilement séduire par la beauté des visages, par la grâce des attitudes, par le choix et l’harmonie des tons. Si je préfère les pendentifs de