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dimension de la peinture, fut confié à M. Mortemart, qui l’exécuta avec une extrême habileté. Le succès fut tel que l’enlèvement du papier collé sur la face peinte pour la protéger pendant le cours des opérations n’entraîna qu’une légère portion de l’ancien vernis. Il ne resta sur la peinture qu’un peu de chanci, qui disparut facilement sans emporter avec lui le moindre glacis, et il suffit, pour rendre au tableau tout son éclat, d’y passer un vernis coupé.

A l’exception d’un léger ton en détrempe, appliqué le long de la balustrade la place où se trouvait le mastic tombé, et d’un raccord également en détrempe sur les bords du tableau, éraillés par le frottement du cadre, qui en couvrait environ cinq centimètres, j’atteste qu’il n’a été donné aucune touche, aucun glacis sur un endroit quelconque de cette peinture, qui emprunte à son admirable conservation une partie de sa splendeur.

Le fait, s’il n’était pas évident pour l’œil le moins exercé, pourrait être confirmé au besoin par une centaine de personnes qui travaillaient ou passent constamment dans le grand salon où le rentoilage a été exécuté. Ainsi tombe de soi-même l’accusation de restauration de la tête et de la draperie du Christ, à qui l’artiste a donné judicieusement un ton plus éclatant, afin de détacher la figure principale de la foule qui l’entoure.

Les repeints qui font tache dans le ciel ont même été respectés, pour éviter en les enlevant de rouvrir des blessures qu’on n’est pas toujours certain de mieux cicatriser.

Quant à l’historiette rapportée par M. Planche au sujet de ce restaurateur qui, après avoir commencé à défigurer le tableau, n’a pu achever son œuvre impie, parce qu’il demandait six mois pour en venir à bout, et que l’administration ne pouvait lui accorder que vingt jours, je m’abstiendrai de la qualifier; avant d’inventer une pareille fable, et surtout de la publier, il eût été plus loyal de prendre des informations sérieuses auprès de l’administration elle-même.

J’ai l’honneur de vous prévenir, monsieur le directeur, que je n’ai nullement l’intention d’établir une polémique. Il ne s’agit pas de l’appréciation d’un fait scientifique, de l’examen d’une question d’art, mais d’une assertion complètement fausse.

J’ai recours, monsieur, à votre bonne foi, à votre impartialité, en vous priant d’insérer cette rectification dans votre prochain numéro, bien certain que vous nous éviterez à tous deux le désagrément d’avoir recours aux moyens que la loi met à ma disposition.

Agréez, monsieur le directeur, l’assurance de ma considération distinguée.


Le directeur général des musées impériaux, intendant des beaux-arts de la maison de l’empereur, membre de l’Institut,

CteDE NIEUWERKERKE.


Il y a deux manières de gâter un tableau : ajouter ou retrancher. Or que dit M. le directeur des musées ? Il affirme que pas une touche n’a été donnée à la toile de Paul Veronèse. Ai-je dit le contraire ? En aucune façon. Il n’y a pas une seule de mes paroles qui puisse se prêter à une telle interprétation. M. le directeur des musées ajoute que l’opération du rentoilage a été exécutée par M. Mortemart avec une rare habileté; je ne songe pas à le contester.