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La trombe éclate, et sur la pente
Qu’abritaient les chênes divins,
Vos champs où la vigne serpente
Sont emportés dans les ravins.
Le sol, œuvre de mille années,
Les chaumières déracinées.
Les sapins croulant des hauteurs,
La glèbe arrachée aux collines
Vont enfouir sous les ruines
La cité des profanateurs.

Aide, ô foudre, à notre colère!
Frappe aussi le glacier d’azur!
Car l’homme aujourd’hui ne tolère
Rien de sublime et rien de pur.
La neige est trop blanche et trop belle;
Qu’un limon vil fonde avec elle
Pour grossir nos flots irrités !
Allons, roulant ce noir mélange,
Noyer dans une mer de fange
Votre orgueil et vos lâchetés.

FRANTZ.


Mol, je veux que le cri de mon âpre justice
Égale vos rugissemens,
Afin que l’âme aussi gronde et les avertisse
Jusqu’à l’heure des châtimens.

Vous savez s’il jaillit de quelque lâche envie,
L’anathème que j’ai lancé;
Leurs coups ne sont pour rien dans le deuil de ma vie;
Je ne suis pas leur offensé.

Mais je maudis en eux leur propre servitude.
L’orgueil qui leur cache leurs fers.
Leur main cupide osant, jusqu’en ma solitude.
Dépouiller les dieux que je sers.

Je les hais de l’amour que j’ai pour la nature.
Les vieux droits et la liberté.
Je puis mêler sans honte à votre saint murmure
La voix de l’honneur irrité.

Je sais bien qu’à leur souffle il est aisé d’éteindre
Et ma flamme, et ces vains discours;