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mille roupies. Nous sommes bien près..... (Il pousse du doigt quelques pages.).13e" régiment : Bird .....................

Ce qui n’empêche pas mes commensaux d’être de très bons, très bienveillans, très aimables compagnons, dont j’ai conservé, et qui, j’espère, conserveront de moi le meilleur souvenir.


Il y a trente ans, le magnifique plateau de ces montagnes était à peine connu de quelques chasseurs entreprenans, qui venaient y poursuivre le gibier dont elles étaient couvertes. Aujourd’hui la civilisation a pris pied sur cette terre, où le tigre et l’éléphant avaient seuls, jusqu’à ces derniers temps, élu domicile. De charmans cottages, des jardins fleuris, des routes excellentes, ont été improvisés partout comme par enchantement. Les montagnes de Neilgerrhies sont devenues une sorte d’Helvétie asiatique, au climat bienfaisant de laquelle les Européens de l’Inde viennent demander de rétablir des santés délabrées par les chaleurs dévorantes des plaines. Te dire qu’il faut espérer rencontrer ici le mouvement et les plaisirs d’Interlaken ou de Spa serait, sans aucun doute, abuser du privilège du voyageur; mais on y mène une vie simple, saine et comfortable, dont voici l’invariable menu. Au matin, une promenade à pied dans les montagnes; dans la journée, quelques visites, suivies d’une séance au club; vers cinq heures, promenade à cheval ou en voiture autour du lac, — et le soir un whist de santé, terminé à dix heures, vous permet d’être debout frais et dispos aux premières clartés du lendemain. Voilà en quelques lignes la vie de chaque jour des habitans de ces montagnes. Puis, comme pour justifier certaines traditions de plaisirs mondains, dont l’origine semble se perdre dans la nuit des temps, c’est le bal anniversaire de la naissance de la reine, quelques concerts donnés par un artiste voyageur, ou enfin un monstrueux dîner (burrah kkanah, c’est le mot consacré dans l’Inde) offert en signe d’adieu à quelque visiteur haut placé dans l’armée ou le service civil.

De digressions en digressions, j’en suis arrivé à briser complètement la trame de mon récit. Pour ne pas abuser toutefois de ta patience, je vais saisir sans plus tarder l’occasion qui se présente d’en renouer les fils en te conduisant au pique-nique donné par le capitaine Brown au pic de Dodopett.

Mon compagnon du bungalow de la montagne avait dérogé en ma faveur à l’étiquette de l’Inde, où l’étranger doit la première visite, pour venir me voir à l’hôtel. Moi, de mon côté, je m’étais rendu deux fois à son cottage; mais mes deux visites avaient été infructueuses, et je n’avais trouvé à domicile ni le maître ni la maîtresse. Ce que