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Page:Revue des Deux Mondes - 1855 - tome 10.djvu/1119

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L'ESPAGNE


ET


LA REVOLUTION DE 1854




L’Espagne depuis un an bientôt est livrée au caprice ironique d’une révolution qui a été l’œuvre involontaire ou imprévue de tout le monde, qui a commencé par tout ébranler pour en venir à s’agiter sur elle-même, et éprouve autant de peine à se fixer qu’à se développer. Ce n’est point la première fois que la Péninsule apparaît sous la figure d’un astre quelque peu irrégulier de la politique, décrivant des ellipses singulières. Quand un souffle de violence se répandait en Europe il y a quelques années, elle se réfugiait dans le calme et y trouvait une sorte de réhabilitation ; quand la tempête s’est apaisée, elle s’est trouvée mûre pour des perturbations nouvelles, comme si elle voulait montrer ce qu’il y a toujours de distinct dans ses commotions. Lorsqu’enfin les plus grandes questions s’élèvent dans le monde, elle se lie les mains par ses convulsions intérieures, comme pour se désintéresser du mouvement général des choses. Née de la décomposition lente et irrésistible d’une situation qui parut un moment réunir toutes les conditions de la durée, la dernière révolution espagnole a cela de particulier, que si elle a été l’expression de l’impuissance des vieilles combinaisons, elle n’a rien fait triompher et en est encore à chercher sa loi et son but : elle n’a été qu’une grande crise qui est venue raviver les plaies invétérées de la Péninsule, rallumer tous les antagonismes, réveiller tous les problèmes et renouer en un mot le cours des fiévreuses agitations. La