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la Méditerranée, il en résulte que la mer moyenne est de 0m,80 environ plus élevée dans la Mer-Rouge que dans la Méditerranée.

Les opérations de 1799 eurent donc ces deux résultats, également erronés, de relever le niveau de la Mer-Rouge de près de 8 mètres en même temps qu’elles abaissaient le niveau du Nil au Caire de la même quantité, c’est-à-dire que le niveau des basses eaux du Nil au meqyas, qui est en réalité de plus de 13 mètres au-dessus du niveau des basses mers, aurait été, d’après ces opérations, d’environ 2 mètres au-dessous de ce niveau, et de A mètres au-dessous de celui de la haute mer. On comprend la portée d’erreurs aussi graves, et on ne sera pas surpris qu’elles aient eu pour conséquence, en ce qui concerne le passé, d’obscurcir de plus en plus l’histoire de l’isthme, et, quant à l’avenir, de donner naissance à des projets impraticables.

Le niveau des basses eaux du Nil est donc en réalité supérieur d’environ 13 mètres à celui de la basse mer, soit dans le golfe de Suez, soit dans la Méditerranée, et de 11 mètres à celui de la haute mer à Suez. Les grandes crues, étant d’environ 7 mètres, élèvent le niveau du Nil de 18 mètres au-dessus de la haute mer et de 20 au-dessus de la basse mer.

Pour se rendre compte de l’état du Nil à une époque antérieure, il faut, ainsi que je l’ai expliqué plus haut, réduire ces hauteurs de 12 centimètres par siècle, et en supposant qu’on remonte au temps de Rhamsès (1300 ans avant Jésus-Christ), soit à trente-deux siècles, le niveau du Nil reste encore supérieur à celui de la basse mer de plus de 16 mètres en hautes eaux et de plus de 19 mètres en basses eaux.

Un calcul que je n’indique pas, de peur de multiplier encore les chiffres, déjà trop nombreux, que je me vois forcé de faire passer sous les yeux du lecteur, démontre qu’à la même époque les hauteurs correspondantes du Nil dans la branche pelusiaque, à Bubastis, origine de l’ancien canal, devaient être de 5 mètres en basses eaux et de 9 mètres en hautes eaux. Si donc les eaux des crues pénétraient librement, dans l’Ouady-Toumilat, jusqu’au lac Timsah et jusqu’au seuil de Serapeum, dont la hauteur n’est que de 5 à 6 mètres au-dessus de la basse mer, il est indubitable que même à cette époque reculée elles devaient chaque année, au moment du maximum de la crue, déverser par-dessus le seuil, dans le bassin des lacs amers. C’est ce qui arriverait certainement encore et a fortiori aujourd’hui, si la vallée était libre, et si les eaux du Nil étaient conduites jusqu’au lac Timsah par des canaux d’une dimension suffisante. Dans la crue de 1800, qui fut remarquable par son élévation, les eaux couvrirent en effet les terrains bas qui entourent le lac Timsah, et elles s’approchèrent beaucoup de Serapeum. Il n’est