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Maine et la Louisiane, entre la ville d’Augusta et la Nouvelle-Orléans. Comme il existe d’Augusta à Quebec, dans les possessions anglaises, un chemin qui s’embranche à Lewistown, sur la principale artère du Maine et des autres états du nord, on peut dire que cette grande voie part du Saint-Laurent pour aboutir au golfe du Mexique. Divers embranchemens en cours d’exécution vont la prolonger au nord jusque sur les côtes les plus lointaines de la Nouvelle-Ecosse. Ce chemin, ou plutôt ces chemins de fer, à peu près complets à la fin de 1854, permettaient déjà d’aller d’Augusta à Montgomery, dans l’état d’Alabama, qui touche au golfe du Mexique, entre la Floride et la Louisiane. Dix-huit compagnies figuraient dans l’alliance sur une étendue de 2,267 kilomètres, et parfois à travers des pays encore presque déserts, appelés ainsi à jouir des voies de communication les plus perfectionnées avant d’avoir eu seulement des sentiers praticables. Après avoir quitté Augusta, on passe par Portland, Boston, New-Haven, New-York, Philadelphie, Baltimore, Washington, Richmond, Wilmington, West-Point. Du lieu d’arrivée à Montgomery partiront bientôt deux routes ferrées s’acheminant vers la Nouvelle-Orléans, l’une par Mobile et Madisonville, et l’autre par les vallées du Mississipi et de Tangepahoa. De la Nouvelle-Orléans, on vient au-devant de cette dernière ligne ; le railway, presque achevé jusqu’à Jackson, est en pleine activité de cette dernière ville à Brandon, d’où l’on n’a plus guère que 250 kilomètres pour atteindre Montgomery.

Certaines dispositions prises par les compagnies facilitent les voyages à d’aussi grandes distances. Ainsi on peut avoir dans les wagons un compartiment séparé, avec un lit. L’Yankee, habitué à parcourir journellement de vastes espaces, s’accommode sans peine de ces installations éphémères : il prend ses aises sans façon ; absorbé dans la pensée de ses affaires, il ne s’occupe aucunement de ses voisins. Les trajets ne sont pas toujours exempts d’incidens périlleux, surtout l’hiver, dans les états du nord-ouest, où les villes se trouvent assez éloignées les unes des autres. Les neiges de 1855, par exemple, avaient enveloppé récemment plusieurs convois, au point de rendre impossible la marche des machines, et de soumettre les voyageurs aux tortures de la faim et du froid en même temps qu’aux angoisses d’une cruelle incertitude.

L’œuvre entière accomplie par les États-Unis formait, au commencement de l’année 1855, un réseau de 34,639 kilomètres de railways en exploitation ; de plus, 26,931 kilomètres étaient encours d’exécution. L’ensemble des chemins de tous les autres pays du monde n’atteint pas des chiffres aussi élevés. Sur les trente-deux états de la confédération, vingt-neuf avaient déjà ou s’occupaient à établir des voies ferrées. Les seuls qui n’eussent encore entrepris aucun travail de ce genre étaient les trois nouveaux états d’Arkansas, de Californie et de Colombie. Deux états n’avaient qu’un seul chemin chacun, d’une étendue de 80 kilomètres environ : le petit état de Rhode-Island, dont la superficie n’est que de 308,000 hectares, et le Texas, dont le territoire immense dépasse 61 millions d’hectares. L’état de Massachusetts est celui où les chemins de fer sont le plus multipliés par rapport à la superficie du pays. Ceux des états où les exploitations actuelles ont le plus de développement sont l’Ohio, l’Illinois, le New-York, la Pensylvanie, l’Indiana