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prit Jérusalem dans la cinquième année du règne de Roboam, c’est-à-dire neuf cent soixante-cinq ans avant notre ère. Quant aux époques antérieures, nous en étions réduits, il y a quelques années, à l’espoir que la mention d’un phénomène astronomique sur les monumens fournirait une date al)solue et dès lors le plus sûr de tous les synchronismes. On s’était bien efforcé de trouver, soit dans le plafond du Rhamesseum ou grand palais de Rhamsès, soit dans l’indication de certaines fêtes se rattachant à un phénomène physique et tombant à un jour constant de l’année naturelle ou vague, le point de départ d’un calcul synchronistique; mais ces tentatives sont demeurées vaines jusqu’au moment où M. de Rougé signala l’emploi qu’on pourrait faire des levers héliaques.

On sait qu’en vertu du déplacement annuel de notre globe les positions successives que le soleil occupe dans le ciel changent par rapport aux étoiles fixes. Si l’on observe plusieurs jours de suite celles qui se trouvent, après le coucher du soleil, dans le voisinage du point de l’horizon où cet astre a disparu, on remarque que ces étoiles sont de plus en plus abaissées, en sorte qu’après plusieurs jours d’observation elles ont fini par disparaître. Elles sont déjà couchées lorsque l’affaiblissement de la lumière solaire commence à permettre de voir les étoiles du côté de l’occident. Quelques jours plus tard, si l’on regarde le ciel vers l’orient, un peu avant le lever du soleil, on revoit ces mêmes étoiles qu’on avait cessé de pouvoir observer, à l’occident, après le coucher de cet astre. Elles semblent avoir passé de l’autre côté du soleil, parce que le mouvement apparent de celui-ci l’a porté vers l’est. Le moment où l’étoile vient d’apparaître à l’orient, au milieu des lueurs crépusculaires, est ce que l’on appelle le lever héliaque. Le déplacement graduel des équinoxes fait changer la date de ces levers héliaques; mais l’ordre des phénomènes astronomiques ayant été calculé, il est possible d’assigner le lever héliaque d’une étoile pour une année déterminée, et réciproquement de connaître à quelle année correspond un de ces levers tombant tel jour et tel mois. La concordance des calendriers égyptien et julien étant établie, les astronomes ont donc tous les élémens nécessaires pour nous apprendre vers quelle époque une étoile donnée se levait héliaquement à tel quantième du calendrier égyptien. Il ne restait plus qu’à découvrir la mention de quelques-uns de ces levers héliaques, et c’est ce qu’a fait M. de Rougé, qui signala en 1852 trois indications de ce genre pour l’étoile Sothis ou Sirius. Ces levers sont rapportés à l’année religieuse des Égyptiens de trois cent soixante- cinq jours, dite année vague. Le premier est consigné dans les fragmens d’un calendrier sacré gravé à Éléphantine, et que M. Lepsius a rapporté au règne de Toutmès III (dix-huitième dynastie). Le second est fourni par le calendrier que Champollion a découvert dans le temple de Medinet-Habou. Le troisième enfin se trouve dans le monument que le même égyptologue a nommé la table des influences stellaires pour toutes les heures de la nuit, table dont plusieurs fragmens nous ont été conservés dans les syringes royales de Biban-el-Molouk. Puisque l’année vague des Égyptiens que nous fait connaître Ptolémée n’a pas cessé d’être en usage chez ce peuple et que son institution remonte aux époques les plus anciennes, il est possible d’établir, en rétrogradant depuis le commencement de la période julienne, des tables de