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ont pris part à l’exposition, la Hollande et la Suisse. Ce sont en effet les seuls dont les races nationales aient de grands mérites, la Hollande surtout. Je ne vois jamais sans un profond sentiment d’admiration ces magnifiques vaches, que je regarde comme la souche commune du plus beau bétail de l’Europe. Presque tous les caractères que l’art a cherché à reproduire ailleurs se présentent naturellement, et avec une ampleur exceptionnelle, chez ces énormes bêtes, qui donnent à la fois des montagnes de viande et des fleuves de lait, et qui ont inspiré, par leur beauté native, des artistes comme Paul Potter, Berghem ou Ruysdael.

Malheureusement la race pure parait avoir besoin, pour prospérer, des riches pâturages et de l’air salin qui lui ont donné naissance. Quelques importations ont été essayées en France ; elles ont laissé peu de traces. Il en est de même, au moins sur la plus grande partie du territoire, de ces belles espèces suisses de Berne et de Fribourg, qui avaient fourni à l’exposition cinquante animaux de choix ; on ne peut en importer que dans le Jura français, où elles retrouvent à peu près leurs conditions premières. Rien n’est plus regrettable assurément, car ces deux familles sont superbes ; leur aspect fait rêver des digues de la Hollande et des vallées des Alpes, ces premiers boulevards de la liberté moderne ; on se demande par quelle loi mystérieuse les plus beaux produits sont dus aux peuples les plus forts et les plus fiers. Les vaches suisses surtout ont l’air d’avoir, comme leurs pâtres, le sentiment de l’indépendance nationale ; chacune avait suspendue auprès d’elle la cloche qu’elles portent au cou, et qui sert à guider le troupeau au milieu des rochers et des précipices. Il y a quelques années, la race de Schwitz était en France assez en faveur ; on espérait y trouver la meilleure réunion connue du travail, de la viande et du lait. Aujourd’hui les idées ont changé ; on s’attache moins à cette union, qu’on regarde avec raison comme difficile ou même impossible, et on aime mieux des animaux qui poussent très loin une qualité spéciale. L’exposition des schwitz, quoique remarquable, a été reçue avec froideur, peut-être même est-on tombé à leur égard dans un autre excès.

L’Allemagne n’avait rien envoyé, ainsi que le nord et le midi de l’Europe. Il ne parait pas qu’on y ait beaucoup perdu ; on dit cependant du bien de la vache du Tyrol et d’une espèce dite de l’Allgau, répandue en Souabe et en Bavière.

Parmi les variétés bovines françaises, il n’y avait que les dix principales, mais ces dix suffisent pour donner une idée générale de nos richesses. En tête venait la race normande ou cotentine, qui comptait 30 animaux, la plus renommée de nos espèces, mais non la plus irréprochable. Depuis longtemps en possession d’alimenter Paris en viande