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même ou épuisé par une longue production, il y a profit a le semer en bois, notamment en pins sylvestres, pour le laisser ainsi pendant vingt ou trente ans. Outre les produits que donnent ces bois par eux-mêmes, ils améliorent le sol, qui peut être ensuite livré à la culture avec avantage. Ainsi se transforme sous nos yeux une partie de la Champagne et de la Sologne ; la même méthode se pratique en grand dans la Campine et le Luxembourg. Je pourrais citer bien d’autres exemples de l’harmonie essentielle entre la culture des bois et toutes les autres.

Nous voici bien loin de l’exposition. J’y reviens pour dire que la production forestière française n’a pas été tout à fait absente. Un ingénieur, M. Chambrelent, a exposé des chênes et des pins maritimes d’une venue magnifique, semés par lui dans les landes de Bordeaux. Ces arbres donnent dans les landes de tels produits qu’on s’étonne de n’en pas voir tout le pays couvert ; il est superflu de chercher péniblement d’autres moyens de production quand on en a de cette puissance. L’exposition de la Corse n’a pas eu moins d’intérêt ; de bonnes routes pénètrent enfin dans ses forêts et permettront bientôt de les exploiter sérieusement. Ce que nous avons vu de plus important, c’est la confirmation définitive de l’admirable découverte du docteur Boucherie pour la conservation des bois. Il y a là toute une l’évolution. Par ce procédé, les bois les plus tendres, comme le bouleau, deviennent aussi durs, aussi incorruptibles que le meilleur chêne. Signalons enfin une machine à faire des courbes pour les navires, qui peut être d’une grande utilité pour l’approvisionnement naval.

J’ai déjà dit un mot de l’Algérie ; c’est là surtout que l’état, en semant des millions d’hectares, peut créer pour l’avenir une richesse incalculable. Des bois et des pâturages, tels sont les plus sûrs moyens de tirer parti des solitudes de l’intérieur, ce qui n’empêche pas de travailler à y attirer par d’autres voies l’émigration européenne, et peut au contraire y contribuer puissamment. L’Algérie possède, nous l’avons vu par l’exposition, des essences précieuses. Rien que sur son propre sol, on peut trouver d’excellentes semences : le chêne-liège, qui y vient partout et qu’il est très facile de multiplier ; le chêne-zân, propre aux constructions maritimes ; l’yeuse ou chêne vert ; une autre espèce de chêne qui nourrit le kermès, cet insecte rival de la cochenille, et qui en produit déjà pour 40 ou 50,000 fr. par an ; le chêne à glands doux, dont le fruit sert à la nourriture de l’homme ; le vélani des îles de l’Archipel, qui fournit une matière propre à la teinture ; le châtaignier, si commun en Corse et en Sicile ; le caroubier, dont la gousse est avidement recherchée par les chevaux ; le thuya, qui rivalise avec l’acajou ; le pin maritime, le pin de