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son attraction n’est pas assez forte pour réunir de nouveau ses particules éparpillées, la comète perdra une partie de sa masse, qui restera disséminée en poussière dans l’espace céleste. Si par l’action du soleil la comète a été fort étirée en longueur, il pourra se faire que toute sa masse, ainsi disséminée, ne puisse se réunir en un seul globe, et que la concentration des particules matérielles se fasse autour de deux ou plusieurs centres d’attraction différens. La comète se partagera ainsi très naturellement en deux, en trois, en quatre, comme cela a probablement eu lieu pour la comète de Biéla. Cet accident doit arriver plus fréquemment aux comètes à courte période, qui n’ont pas le temps de rappeler à elles leurs élémens écartés par l’action du soleil, tandis que pour la comète de Halley par exemple, laquelle met en moyenne soixante-dix-sept ans pour faire sa révolution entière, ces élémens épars ont le temps de graviter les uns vers les autres. Il est encore évident qu’une très petite comète, dont l’attraction est peu puissante, sera bien plus sujette à périr par dissémination qu’une masse plus considérable qui aurait la force de retenir ou de rappeler les parties qui s’en seraient éloignées. Comme dans cette question tout dépend de la force séparatrice que le soleil exerce sur la nébulosité légère qui forme la comète, il est bon d’insister un peu sur ce mode d’action. Tous les auteurs qui ont dit ou soupçonné que les comètes pouvaient graduellement perdre de leur substance en fournissant de la matière aux appendices qui en émanent, quand elles approchent du soleil, n’ont pas précisé comment le soleil pouvait, pour ainsi dire, tirer en longueur un amas arrondi de nébulosité qui passe dans son voisinage. Voici comment la chose se fait.

Tout le monde se figure aisément que si une comète rase de près le soleil, elle sera plus attirée et prendra un mouvement plus rapide que si elle eût été plus loin du soleil. Si, de même dans l’ensemble des particules qui composent une comète, on considère celles qui sont le plus près du soleil, elles prendront une vitesse plus grande et devanceront celles qui en sont le plus éloignées. Il en résultera un allongement de la masse cométaire dans le sens de son mouvement, et si ensuite dans le reste de sa révolution la comète n’a pas le temps ou la force nécessaire pour réunir ses élémens dispersés, ceux-ci, suivant chacun une route séparée, se dissémineront pour toujours dans la région du ciel que parcourait auparavant la comète entière. C’est sans doute au moment de sa seconde arrivée près du soleil en 1850 que la comète perdue a été disséminée par l’action inégale du soleil sur ses diverses parties, sur quoi on remarquera que la comète, après son passage près du soleil en 1844, formait une masse irrégulière et allongée, et que si cette forme a subsisté jusqu’à son retour, et qu’elle ait, en vertu d’une rotation sur elle-même, présenté une de ses pointes au soleil, alors il y a eu une très grande différence entre l’action du soleil sur cette extrémité voisine, comparée à l’action de l’astre sur l’autre extrémité bien plus éloignée, et par suite une grande différence entre les routes suivies par les diverses particules du corps de la comète, ce qui revient à une complète dissémination.

Tout ce que je viens de dire paraîtra plus vraisemblable encore, si l’on se rappelle ce que j’ai répété plusieurs fois dans la Revue de l’extrême ténuité de la nébulosité qui forme la substance de la comète, ténuité qui surpasse tout ce que l’imagination peut se figurer, et qui a porté sir John Herschel