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quatre mille hommes, suffisamment pourvus de vivres pour un mois. Il laissa à Serajevo, pour la garde du mejlis, huit cents hommes, sous le commandement du général de division Abdi-Pacha, qui avait ordre, en cas de soulèvement, de bombarder la ville et d’y mettre le feu sans ménagement. À cet effet, on prépara publiquement les cercles à feu, afin d’intimider les habitans, et on les transporta en plein jour dans le camp situé aux portes de la ville. En ce moment, le nouveau gouverneur civil de la Bosnie, Haïreddin-Pacha, s’embarquait à Constantinople, avec mille hommes nouvellement recrutés, pour se rendre par Cattaro et l’Herzégovine à Serajevo. Omer-Pacha marcha avec ses quatre mille hommes sur Travnik, mais il fit un détour près de Ktez-Han pour rencontrer l’avant-garde des insurgés, forte de trois mille hommes, à Zenitza. Il la culbuta le 18 octobre, occupa Zenitza, y laissa cent hommes et chercha à tourner le corps principal de l’ennemi, qui occupait la forte position de Vranduk avec huit mille hommes et deux canons. Le mouvement fut exécuté avec un plein succès. Mustahi-Pacha, chef des insurgés, qui avaient leur quartier-général dans cette forteresse, s’étant avancé à la rencontre d Omer-Pacha dans l’espoir de le surprendre, fut obligé de se replier sur la place, tandis que les trois mille hommes réunis sous ses ordres étaient dispersés par l’armée turque. Bientôt Vranduk même fut attaqué et dut se rendre. Une position qui dominait la forteresse était tombée aux mains des troupes d’Omer-Pacha. Celui-ci fit préparer sous les murs mêmes de Vranduk, pour fêter sa victoire, un festin avec les bœufs et les moutons abandonnés par les insurgés[1]. Dans l’après-midi du même jour, la garnison du fort de Vranduk voyait apporter dans le camp d’Omer-Pacha de grandes pièces de bois qui devaient servir à la construction d’une écurie provisoire. Croyant qu’on préparait des échelles d’assaut, les insurgés envoyèrent avant la nuit des parlementaires pour demander l’aman. Omer-Pacha le leur accorda après quelques momens d’hésitation, et entra le même soir, au bruit du canon, dans le fort de Vranduk, qu’il occupa ainsi que les maisons abandonnées, où furent déposés les blessés. Une petite garnison, retirée sur un rocher imprenable, attendit la nuit, et, à la faveur de l’obscurité, disparut malgré la vigilance des sentinelles, sans laisser de traces de sa fuite.

Le lendemain, Omer-Pacha fut informé que la plupart des fuyards de Vranduk avaient pris un sentier détourné à travers les montagnes pour se rendre à Tousla, que les insurgés n’étaient guère disposés à se battre contre lui, et que Mustahi-Pacha et Mahmoud-Pacha

  1. Les Bosniaques avaient eu dans ce combat trois cent quarante-un morts et quatre-vingt-treize blessés. Du côté des troupes impériales, il y eut quinze morts et cent neuf blessés.