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Piémontais, puis et surtout par notre compatriote Pacho, dont le beau travail est un magnifique monument élevé à l’archéologie. Ensuite est venu M. Vatier de Bourville, agent consulaire de France à Bengazi, dont le zèle infatigable et éclairé a enrichi le musée du Louvre d’une foule de vases peints, d’inscriptions, de bas-reliefs et autres objets d’art antique provenant de la Cyrénaïque. Cette mine n’est pas du reste au moment de s’épuiser, car j’en ai rapporté en 1852 près de deux cents pièces provenant de fouilles postérieures à celles de M. de Bourville.

Au sud du Djebel-Akhdar, à huit journées de marche de Bengazi[1], on trouve l’oasis d’Audjilah, bien connue depuis Hérodote, qui en donne une description exacte et la désigne sous le nom qu’elle porte encore. Cette oasis se compose de quelques villages ou hameaux épars dans un bois de palmiers, et n’est guère arrosée que par de l’eau de puits, car il n’y existe qu’une petite source située à trois lieues au nord du village principal. La population en est de dix mille âmes, et une partie seulement se livre à l’agriculture, simple et très peu pénible dans les oasis. Le reste se consacre au commerce de transport des caravanes entre l’Egypte et divers points de la régence de Tripoli. Les gens d’Audjilah trouvent dans cette industrie une source de richesses relatives; ce sont les Hollandais du désert lybique. Le chef de cette oasis portait le titre de bey au temps de l’indépendance de Tripoli. Lorsque Pacho la visita, ce bey était un renégat français appelé Abou-Zeith-Abdallah, ancien tambour de l’armée d’Egypte, fait prisonnier à l’âge de douze ans. En 1851, un journal ayant annoncé la mort d’un bey d’Audjilah, du nom de Tamar, né Français sous celui de Souchon, et, comme l’Abou-Zeith de Pacho, ancien tambour de l’armée d’Egypte, le consulat général de France à Tripoli fut, pendant plusieurs mois, assailli de lettres de prétendus parens de ce Tamar-Bey, qui réclamaient son héritage, qu’on disait être considérable. Malheureusement il fut impossible d’avoir aucun renseignement sur cet être fantastique; mais ce qui peut consoler ses héritiers chrétiens, c’est que, quand même son existence aurait été réelle, ils n’auraient eu, d’après la loi du pays, aucun droit à sa succession.

On compte huit jours de marche d’Audjilah au fond de la Grande-Syrte, qui est à l’ouest, tirant un peu vers le nord. Cette distance est coupée, à peu près vers le milieu, par l’oasis peu importante de Meradah. A l’est, et à neuf journées d’Audjilah, on trouve l’oasis de Siouah, si célèbre dans l’antiquité par le temple et l’oracle de Jupiter

  1. Les Turcs ont construit un petit fort sur cette ligne, en 1852, dans une localité appelée Merdje.