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Auxquelles s’arrêter? Par où commencer et par où finir? Besogne difficile, et il faut dire que la commission chargée du classement n’a rien fait pour l’alléger. Au lieu de rapprocher les produits analogues, elle a mis la France à l’un des pôles du palais, l’Angleterre à l’autre pôle, l’Algérie le long de la Seine, les autres états au rez-de-chaussée ou dans les galeries supérieures, sans avoir souci de l’embarras que cette dissémination devait causer au visiteur, ni au trouble qu’elle devait jeter dans les esprits. Si on avait voulu soustraire cette exposition universelle à une appréciation raisonnée et à un examen réfléchi, je doute qu’on s’y fût pris autrement. Comparez donc les soies du Piémont avec celles de la Lombardie, lorsque ces deux états, dont les frontières se touchent, sont séparés aux Champs-Elysées par des masses de produits, et qu’on ne peut aller de l’un à l’autre qu’en traversant l’Inde et la Chine! Le classement n’est donc ni industriel, ni géographique, et il est en outre peu favorable à l’observation. Aussi, quelque désir que j’eusse de voir toutes les soies et d’en parler aussi pertinemment que possible, dois-je avouer qu’il en est beaucoup dans le nombre qui ont échappé à mes recherches. Où trouver les États-Unis? où trouver le cap de Bonne-Espérance? Qui me conduira vers Tripoli? Dans quelle direction est situé le Mexique? Tous ces pays ont des soies, et c’est en vain que j’ai voulu m’assurer de leur existence : après quelques efforts j’ai dû y renoncer.

Les vides sont d’ailleurs sensibles et portent sur les soies d’Asie principalement. Ni la Chine, ni le Bengale n’ont des étalages en rapport avec l’importance de leurs opérations et le rôle que ces pays jouent dans l’approvisionnement européen. L’Asie-Mineure et la Syrie sont dans le même cas. Je n’ai vu ni mestoup de Brousse, ni grèges de Beyrouth, ni perses, ni saloniques, ni demerdechs. Ce ne sont pas là sans doute des soies supérieures, mais elles ont leur destination dans la manufacture et leur place dans le mouvement commercial. Ne fût-ce que comme contraste, il eût été curieux de les voir en regard des belles provenances du Vivarais. L’Espagne n’a pas non plus d’assortiment complet; tout se borne à quelques échantillons de Tolède, de Valence et de Murcie. Même disette dans les envois du Portugal, qui compte seulement cinq exposans, parmi lesquels le duc de Palmella. Ajoutons à ces catégories négatives l’Egypte, Tunis et deux ou trois autres localités insignifiantes, et nous resterons en présence des véritables états exposans, — le Piémont, la Lombardie, la Toscane, Rome, la France, et son satellite l’Algérie. Je ne parle pas du royaume de Naples, qui s’est fait une place à part dans l’exposition et y brille par son absence.

Le Piémont est vigoureusement et dignement représenté. On sent, dans ce petit royaume, une sève et une ardeur qui se répandent