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suc du ficus chistica ou de l’ycomandra avec le soufre ou la gomme laque, la saponification ou la combinaison des alcalis avec les acides de l’huile, la fermentation du raisin ou de la betterave, qui transforme en alcool le sucre qu’ils contiennent, les distillations qui produisent les essences si variées de la parfumerie, l’art de retirer du minerai le fer, le zinc, le plomb, celui de former des alliages entre ces divers métaux et de connaître les propriétés de chacun suivant la nature et la proportion des métaux employés, tous ces procédés divers reposent sur des phénomènes chimiques qu’une étude sur la chimie à l’exposition universelle devrait décrire.

Ce n’est pas tout; une science qui contribue plus que toute autre à la richesse d’un pays, l’agriculture, après avoir dédaigné longtemps les secours de la chimie, en est arrivée aujourd’hui à ne plus pouvoir se passer d’elle, et les établissements agricoles sont devenus ou des manufactures ou des laboratoires. Les agriculteurs, ou du moins la plupart d’entre eux, ont enfin conçu cette notion si simple, et qui, comme toutes les notions simples, a mis six mille ans à se faire jour, que l’on ne pouvait retirer d’un lieu que ce que l’on y avait mis, et qu’ainsi les fumiers n’étaient pas, comme on le croyait, un excitant destiné à mettre enjeu les forces productrices de la terre, mais les matières premières elles-mêmes, qui, transformées par la végétation, devaient composer le seigle ou le blé, la betterave ou la pomme de terre. On a compris dès lors que la nature des fumiers devait varier avec la nature de la récolte, et que puisque ce n’était plus une sorte de ferment dont une petite quantité suffisait pour causer la végétation, comme quelques grammes de levure de bière font fermenter des quantités presque infinies de sucre, il fallait augmenter le poids du fumier jeté sur la terre proportionnellement au poids de la récolte qu’on devait en retirer, et varier la nature de ce fumier avec la composition intime de cette récolte. Ainsi le fumier jeté sur un champ de blé doit contenir des phosphates et de l’azote, — le fumier des vignes, de la potasse, etc. Il a donc fallu s’adresser aux chimistes pour connaître la composition des plantes et des engrais. Ce sont eux encore qui ont indiqué quels végétaux puisent dans l’air une partie de leur nourriture, quels autres ne peuvent absorber que par les racines les liquides qui doivent les nourrir, et par conséquent quelles récoltes épuisent la terre, quelles autres peuvent la fertiliser. Enfin c’est aux chimistes que l’on doit l’idée de réunir aux établissemens agricoles des fabriques qui en utilisent les résidus ou les productions. C’est ainsi que des agriculteurs ont fabriqué du sucre avec leurs propres betteraves, du noir animal avec les os des chevaux qui servent à nourrir les cochons, etc.

Il est aussi un certain nombre de fabriques qui donnent des produits chimiques proprement dits, et qui ont acquis beaucoup