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biens domaniaux. Le sacrifice était énorme, irréparable pour beaucoup de familles. Néanmoins la noblesse hongroise succomba. Deux choses contribuèrent à sa ruine, une faute et un malheur. Influencée par ses glorieux souvenirs, l’aristocratie magyare revendiqua la domination sur toutes les contrées qui avaient composé autrefois le royaume de Hongrie. Telle fut la faute commise. C’était se mettre en contradiction avec le principe où la nationalité hongroise puisait son droit et sa force, puisqu’elle prétendait à son tour englober et régenter plusieurs peuples de races différentes. La cour d’Autriche eut alors beau jeu pour susciter contre le Magyare — le Slave, le Croate, le Serbe, le Roumain. Le malheur fut que la guerre civile paralysa les bonnes intentions de la noblesse hongroise, et que les réformes demeurèrent comme non advenues aux yeux des peuples qui n’en ressentirent pas les effets. En réalisant un peu plus tard les améliorations qui devaient régénérer le pays, le gouvernement autrichien eut l’air d’en prendre l’initiative, et il acquit par-là un mérite aux yeux des peuples.

Pendant la session de l’assemblée constituante convoquée à Vienne après la révolution, un député obscur présenta un projet tendant à l’émancipation de la terre et du cultivateur dans toutes les parties de l’empire. Une pareille proposition devait réunir tous les suffrages dans les circonstances où l’on se trouvait. Le ministre qui représentait le gouvernement impérial à cette séance témoigna le regret d’avoir été devancé. Il déclara seulement qu’en adoptant le principe, il était prudent de ne pas promettre l’abolition pure et simple de toutes les redevances acquittées par les paysans, et qu’il fallait réserver la question de l’indemnité au profit des seigneurs. Le nexus subdiletœ fut donc aboli par un acte parlementaire du 7 septembre 1848.

Ce précédent révolutionnaire était un acheminement au système d’unité civile et de centralisation administrative, idéal des hommes d’état autrichiens. Le pouvoir absolu, rétabli un peu plus tard, se trouva autorisé à dire qu’il accomplissait le vœu national et populaire en abolissant l’espèce de souveraineté du seigneur sur son sujet, le droit héréditaire de rendre la justice, les immunités fiscales, en un mot tous les privilèges contraires à l’égalité dans les relations civiles.

L’Autriche eut ainsi son 89 par le fait de son gouvernement. La constitution du 4 mars 1849, tout en ménageant encore les susceptibilités de races, pose en principe que toutes les parties de l’empire et les habitans de toutes classes doivent contribuer aux charges publiques. Un système d’impôts fonciers doit être établi d’après un travail cadastral, et sans égard aux franchises existantes. En 1850, il est déclaré, par patente impériale, que a la suppression des douanes