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occupait un poste important et de création assez récente, appelé Aumale, situé à la naissance du grand plateau qui s’étend à l’est du Jurjura. C’était une des régions de l’Algérie où la soumission était la plus précaire et la moins complète. Aussi les zouaves avaient-ils eu de nombreuses courses à faire dans les montagnes et plusieurs combats à livrer, lorsque vers la fin de 1849 des événemens importans qui s’accomplissaient dans le sud de la province de Constantine les y firent appeler en toute hâte. Les lecteurs de la Revue n’ont pas oublié le récit émouvant du siège de Zaatcha inséré ici même[1] par un des combattans, le capitaine Charles Bocher : cette colonne qui traverse rapidement le désert portant le choléra dans ses flancs, ces soldats dont l’épidémie, les privations de tout genre, une résistance désespérée, n’ont pu abattre l’énergie, rassemblant tout leur courage pour un dernier et décisif assaut; le colonel Canrobert arrivant le premier sur la brèche, cheminant à travers un dédale de ruelles, échappant par miracle à la mort qui frappe tout autour de lui; l’effort suprême du commandant Lavarande pour forcer le dernier réduit des défenseurs; la mort de Bou-Zian et le dénouement sanglant de ce drame terrible. Dans ce siège si long et si difficile, conduit avec tant de persévérance par le général Herbillon, quatre-vingts officiers et plus de neuf cents soldats avaient été atteints par le feu de l’ennemi. Ce succès si cruellement acheté ne fut pas encore le signal du repos pour les troupes qui l’avaient obtenu. Les zouaves suivirent leur vaillant chef sur les pentes de l’Aurès, et terminèrent brillamment la campagne au cœur de l’hiver par la prise de Narah. Rentrés à Aumale, placés sous les ordres d’un nouveau colonel, M. d’Aurelle[2], digne successeur de ses illustres devanciers, les zouaves furent deux ans aux prises avec la confédération kabyle qui leur avait donné son nom, et prirent part à toutes les opérations dirigées dans la vallée de l’Oued-Sahel, et dans le pâté de montagnes connu sous le nom de la Grande-Kabylie.

Leurs services étaient si constamment bons, si constamment utiles, que le gouvernement se décida à augmenter leur nombre. Un décret du 13 février 1852 donna une nouvelle organisation au corps des zouaves; il devait y avoir trois régimens de trois bataillons chacun. Les trois bataillons existant devaient servir de noyau aux

  1. Voyez la livraison du 1er avril 1851.
  2. Aujourd’hui général de brigade et employé en Crimée.