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dont la tradition n’a pas conservé le souvenir : ils ont quelquefois donné lieu à des expériences intéressantes. En Angleterre, une ancienne couche incendiée et désignée dans les cartes de la contrée sous le nom de Burning Hill (colline brûlante) fut, il y a quelques années, le théâtre d’une spéculation tout anglaise. Les propriétaires, voyant que ce terrain faisait verdir l’herbe pendant l’hiver, eurent l’idée d’y établir une école d’agriculture d’un caractère nouveau, dans laquelle on chercherait à naturaliser les arbres des contrées équatoriales. D’abord l’entreprise eut un plein succès; les bananiers, les palmiers, les aloès, les cocotiers, les ananas semblaient avoir oublié leur soleil natal et se plaire à merveille sur cette terre chauffée par le soleil souterrain de la mine embrasée; mais peu à peu le foyer de l’incendie se déplaça, le jardin reprit sa température normale, et la flore de l’équateur, qu’on croyait s’être faite anglaise, disparut. Ces expériences si simples semblent appuyer la théorie du feu central, ou du moins elles expliquent l’action qu’aurait pu exercer à l’origine des choses ce feu intérieur sur le nivellement des climats. C’est ici un nouveau point de vue auquel nous sommes conduits naturellement. L’étude des mines de houille va nous mettre sur la voie pour déterminer l’origine et la formation du terrain houiller.


II.

Trop longtemps la science et l’industrie ont marché séparées l’une de l’autre : les rapports de la géologie et de l’économie politique ont été méconnus; ces rapports sont pourtant intimes, car c’est la nature des terrains qui détermine, en grande partie, la prospérité des états. La fertilité présente de quelques districts, le caractère stérile de quelques autres, l’élément industriel et commercial des provinces, tout cela est une conséquence des très anciens événemens qui ont plusieurs fois modifié et remanié la constitution de notre globe. Une partie de cette histoire se trouve écrite en caractères authentiques dans la contexture du terrain houiller. A ce point de vue, la mine est un livre.

Quand on parcourt ces catacombes de la nature, où les siècles dorment entassés sur les siècles, où gisent les flores et les faunes éteintes, la première idée qui se présente à l’esprit est celle des changemens survenus dans le monde physique. La matière végétale dont la houille est formée s’est minéralisée au fond de marais qui sont comblés depuis longtemps; les arbres dont les empreintes se dessinent nettes et régulières sur le toit des couches ont appartenu à des forêts qui n’existent plus. Les terres sur lesquelles ces forêts croissaient ont disparu ou ont changé de forme; cherchez les rivières