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lui avait valu d’embellissemens, tant de la part des Romains que de celle des Grecs. Lorsqu’on recrée par la pensée les édifices que Tamerlan a pu détruire à Damas et qu’on les ajoute à ceux qui ont survécu à cette dévastation stupide, on est presque de l’avis de Mahomet, quant au rapprochement qu’il établissait; mais, loin d’être, comme lui, disposé à fuir Damas, on se sentirait disposé à y vivre. Du reste Mahomet n’a pas oublié Damas ; il en a fait la quatrième ville de l’islamisme. D’après les croyances musulmanes, c’est sur le sommet du principal minaret de la grande mosquée de cette ville que le prophète Jésus (car les musulmans reconnaissent Jésus comme le plus grand des prophètes après Mahomet) descendra aux temps apocalyptiques. Ce minaret se nomme, pour cette raison, Aïssa ben Meriem (Jésus, fils de Marie). Même telle qu’elle est aujourd’hui, Damas a un charme réel pour ceux qui l’ont habitée longtemps; l’étude physiologique des diverses races d’hommes qui s’y rencontrent, appelées par des intérêts de commerce ou par des motifs religieux, l’étude des cultures, des industries exploitées par une population de près de deux cent mille habitans, tout cela forme un ensemble qui attache au-delà de ce que suppose le simple voyageur.

Nous venons de donner une idée du territoire de la Syrie. C’est du sein de sa capitale que nous pouvons maintenant observer les mœurs des populations nomades ou sédentaires de cette partie de l’Orient, ainsi que le rôle de l’administration appelée à les surveiller et à les régir.


II.

Grâce aux irrigations qu’il doit à ses deux rivières, et grâce à l’esprit d’industrie de ses habitans, le territoire de Damas produit de l’huile, du vin, des fruits de toute sorte, du coton, du sésame, de la soie, du blé, de l’orge, du maïs, de la garance, de l’anis, du safran, du chanvre, du savon, des étoffes de soie, des étoffes de coton, etc. D’un autre côté, par sa position à l’entrée du désert, Damas a été de tout temps un entrepôt commercial d’une importance incontestable. C’est là qu’arrivent, fortes de 1,000 à 1,500 chameaux, ces caravanes de Bagdad, portant le tombecky, sorte de tabac très recherché dans les pays musulmans, les soies de Perse, la Comme adragante, la gomme copale, l’indigo des Indes et plusieurs autres produits des parties de l’Asie situées au-delà de l’Euphrate et du Tigre. En échange, Damas expédie à Bagdad ses étoffes de soie, des tissus de coton anglais et suisses, des draps français et autrichiens, des draps d’or et d’argent, du sucre raffiné, du café, etc. Le désert lui vend du poil de chameau, de la laine des bêtes de somme (des