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taille d’Inkermann, songeant assez peu aux belles-lettres, on le comprend. Il vivait de cette mâle et forte vie dont il a déjà fait plus d’une fois passer le reflet dans ses pages avec une verve passionnée et communicative. Intéresser l’esprit et le cœur, c’est là après tout le dernier mot dans la littérature, et de même que M. de Molènes intéresse à ses héros, M. Paul de Musset intéresse au récit de ses excursions au-delà des Alpes ; c’est là le caractère de ce Voyage pittoresque en Italie où l’art du dessin ajoute aux tableaux de l’écrivain. C’est en observateur ingénieux, en esprit fin et élégant, que M. Paul de Musset traverse ces contrées immortelles, décrivant les mœurs, s’arrêtent devant les richesses de la peinture, peignant la nature et les hommes, ranimant cette existence italienne dans son originalité pittoresque. Passer les Alpes, aller de Naples à Venise, qu’est-ce donc aujourd’hui ? l’Italie est à peine une étape pour les esprits heureux ; l’instinct des voyages a besoin d’autres espaces. C’est à peine si l’on peut s’attendre à trouver quelque nouveauté dans quelque archipel inconnu. Lorsque nous aurons exploré le monde, alors il ne nous restera plus peut-être qu’à découvrir quelque coin ignoré dans notre propre pays, — et cette découverte inespérée ne laissera pas d’avoir un charme secret et émouvant. L’esprit y trouvera une source nouvelle d’inspiration. La littérature gagnera peut-être à se rapprocher du sol natal, comme pour y puiser le rajeunissement et la force. Puisse donc aujourd’hui l’esprit littéraire se retremper à cette source ou à une autre, pour entrer dans la carrière qui s’ouvre avec la fraîcheur et la puissance d’une jeunesse nouvelle ! Il a peu produit dans l’année qui finit ; il produira sans doute dans l’année qui commence. Oublions ce qui est derrière nous, et marchons d’un cœur libre et ferme vers cet avenir que nos bonnes volontés feront éclatant ou stérile. Puissent aussi les autres nations trouver dans leur vie littéraire comme dans leur vie politique les prospérités et les succès qu’elles poursuivent sans les atteindre toujours !

Chacune de ces nations a sa part dans l’histoire contemporaine ; chacune a ses intérêts, ses affaires pratiques, ses crises parfois et ses préoccupations. Chez la plupart, ces préoccupations ont leur retentissement naturel dans les parlemens. En Angleterre, on a vu comment la question de la guerre avec la Russie était devenue l’occasion de discussions sérieuses et animées, et cependant le parlement n’a eu à s’occuper encore que des moyens militaires. Il reste à aborder les questions financières, qui ne seront point agitées sans doute avec moins de passion. En Prusse, un membre du parti libéral dans la seconde chambre a fait une motion pour qu’il fût adressé, contre l’usage, une réponse au discours royal. Cette motion n’avait d’autre but que d’engager la chambre dans une discussion sur les affaires extérieures, si le principe même de l’adresse eût été admis ; mais cette motion a été repoussée justement à cause de ce qu’elle faisait pressentir. Aujourd’hui en Prusse comme en Angleterre, les chambres ont suspendu leurs travaux et sont entrées dans les vacances de Noël. Il en est de même en Belgique, où le parlement s’est ajourné jusqu’à la mi-janvier. Les élats-généraux de La Haye ont aussi suspendu leur session pour ne reprendre leurs travaux qu’au mois de février. Cette suspension n’a point eu lieu cependant sans être précédée, dans les chambres hollandaises, de quelques incidens qui se sont produits à l’occasion de la discussion du budget. C’est d’abord le budget de la marine