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Aucun succès n’a couronné ces espérances. Nous n’en savons pas plus que nos pères sur ce qui regarde l’essence des choses, ou si l’on veut, sur l’absolu. Le secret des progrès récens des sciences est tout entier dans la recherche des vérités de comparaison, qui sont bien plus accessibles à l’esprit humain que ce qui touche à l’essence même des choses. Ainsi, sans avoir besoin de notions sur la nature intime du temps, je puis mesurer une durée et dire combien elle confient de jours, d’heures, de minutes et de secondes. C’est donc en vain que l’on demanderait aux théories astronomiques le secret ou plutôt les secrets de l’humanité. Les lumières qu’elles nous offrent ne peuvent servir qu’à reconnaître l’erreur ou l’imposture de ceux qui ont tiré de quelques parties de la science sidérale des moyens d’influence peu légitimes, comme les devins et les astrologues.

Nous ne voyons donc pas comment la croyance à la pluralité des mondes peut être, — ainsi que sir David Brewster l’affirme dans le titre de son livre, — le credo du philosophe et l’espérance du chrétien. Les inductions scientifiques qui peuvent fixer les présomptions et déterminer la conviction sur cette matière n’ont rien à dire pour la destinée future de l’homme. Comme tous les ouvrages de la nature, ces idées peuvent porter à l’admiration de l’univers et de la puissance créatrice. Néanmoins, sous ce point de vue même, la nature animée offre des effets d’organisation et de prescience bien au-dessus de tout ce que les mouvemens des corps célestes peuvent nous révéler. Si l’esprit humain a triomphé dans les théories astronomiques malgré les distances et les influences mutuelles, c’est que le sujet était comparativement aisé et saisissable par les formules mathématiques ; mais prenez le moindre grain de blé, et tâchez de pénétrer le mystère de ces germes qui se perpétuent à l’infini en se multipliant, se divisant et se reproduisant toujours les mêmes ! Quelles causes motrices emmagasinerez-vous par la pensée dans des espaces si infiniment petits pour qu’il en résulte ce qu’on observe ? La pénétration de la pensée vient bien vite se briser contre de tels obstacles à la connaissance de la vérité, et bon gré mal gré on est promptement réduit à ignorer.

L’un et l’autre des ouvrages qui m’ont servi de texte se terminent par un chapitre sur les destinées futures de l’univers. Voici les curieux points de vue sous lesquels M. Brewster envisage l’état futur de l’homme après cette vie : « l’astronomie, dit-il, réunit à un haut degré les intérêts du passé, du présent et de l’avenir !… L’Écriture sainte n’a point parlé d’une manière explicite de la future résidence des élus, mais la raison a combiné les notions éparses qu’ont laissé échapper les inspirés, et avec une voix presque d’oracle elle a proclamé que l’auteur des mondes placera les êtres de son choix dans