Page:Revue des Deux Mondes - 1855 - tome 9.djvu/389

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

les mondes qu’il a créés… La raison nous porte à croire que notre corps matériel, qui doit ressusciter, sera sujet encore aux lois de la nature et résidera dans une demeure matérielle… C’est l’astronomie seule qui découvre à l’œil du chrétien la mystérieuse étendue de l’univers, et lui crée un paradis compréhensible dans un monde à venir. » Voilà des idées bien nouvelles et des spéculations d’une intelligence qui ne peut s’arrêter dans un doute prudent et dans une incertitude pénible ! A ceux qui nous demanderaient s’il faut croire à la réalité de cette organisation de l’avenir, nous dirons avec Fontenelle : « Pourquoi non ? »

La conclusion du révérend Whewell est parfaitement opposée : il pense que la science et la philosophie ne peuvent point donner à l’homme la conviction d’un avenir glorieux. Il reconnaît cependant que si les inductions scientifiques prouvent quelque chose, c’est que le créateur peut produire un être aussi supérieur à l’homme que l’homme dans la plénitude de la perfection l’est aux brutes, et de plus que l’intelligence humaine est d’une nature divine et par suite impérissable. M. Whewell semble attendre pour l’homme une transformation en un être de nature supérieure. Fiat !

Quelle est donc, dans l’état actuel de la science, la conclusion à laquelle on doit s’arrêter relativement à la pluralité des mondes ? D’abord nous ferons observer qu’il n’est nullement nécessaire d’avoir une opinion arrêtée là-dessus ni pour la théologie, ni pour la métaphysique, ni pour la philosophie, pas même pour le progrès des sciences d’observation. Cette proposition une fois établie, si une curiosité bien louable nous porte à rechercher la vérité ou plutôt la vraisemblance dans les questions de cet ordre, nous dirons qu’il est probable et même presque certain que les planètes qui entourent notre soleil et toutes les étoiles sont habitées comme la nôtre et avec tous les degrés d’intelligence et toutes les variétés d’organisation que l’on peut admettre. Quant aux soleils et aux lunes, nous n’avons aucune induction qui nous conduise à les peupler.

Fontenelle fait très bien observer qu’on n’a aucun moyen de se figurer les êtres vivans des planètes autres que la terre. Au commencement de ce siècle, une expédition française partit pour explorer le continent qu’on appelle aujourd’hui l’Australie. On y trouva des cygnes noirs, des animaux à poils ayant un bec d’oiseau et pas de dents, comme serait, un chien de moyenne taille ayant un bec de canard. De plus les quadrupèdes ne se reproduisaient ni par des œufs ni par des petits vivans. Après une espèce d’avortement, les fœtus se plaçaient dans une poche membraneuse située près de l’organe d’allaitement, et y complétaient dans une adhérence prolongée le développement que les petits des animaux prennent ici avant de naître. Les carnassiers eux-mêmes participaient à cette sorte d’organisation ;