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M. Achard fils, que j’ai connu lorsque je me livrais aux études d’optique qui m’ont ouvert les portes de l’Institut, et qui m’avait été indiqué par M. Haüy lui-même. Ce joaillier expert, qui est maintenant à la tête d’une de nos premières maisons de Paris, joint à l’expérience et à la probité de son père une pratique que la science, aidée des notions théoriques, ne trouve jamais en défaut. Je n’aurais même pas écrit avec assurance ces pages sur le diamant et les pierres précieuses, si je n’eusse pu compter sur la collaboration consultative de M. Achard.

Qu’est-ce que le diamant ? C’est ce qu’il y a de plus précieux et de plus cher au monde. Qu’est-ce que le charbon ? C’est la matière usuelle la plus commune et une de celles que l’on trouve en dépôts immenses dans les entrailles de la terre, en même temps que les plantes, les arbres de toute espèce en contiennent une inconcevable quantité. L’argent peut à peine payer le diamant, car si l’on imagine un diamant pur du poids d’une pièce de 25 francs, il pèsera environ 125 carats et vaudra au minimum 4 millions de francs, tandis qu’un poids pareil de charbon n’aura, même avec les pièces de cuivre les plus petites, aucune valeur assignable. Et cependant le diamant et le charbon sont identiques : le diamant n’est que du charbon cristallisé.

Lorsqu’une substance quelconque tenue en fusion dans de l’eau ou tout autre liquide vient à se déposer tranquillement, il en résulte un produit auquel on était loin de s’attendre. Ce n’est point un corps compacte comme une pierre, un caillou, un morceau de pavé ou de moellon tiré d’une carrière et n’offrant aucune forme déterminée. Si le corps fondu dans l’eau est du sel ordinaire, du salpêtre, du sucre, de l’alun, le dépôt laissé par l’eau en s’évaporant affectera des formes régulières et telles que l’art les aurait produites avec le secours de la géométrie. Le sel offrira des figures carrées en tout sens, et ses grains seront ce que la géométrie appelle des cubes. Telle serait la forme d’un livre qui, coupé carrément, aurait autant de hauteur que de largeur, et autant d’épaisseur que de largeur ou de hauteur. Telle est encore la figure connue d’un dé à jouer, que les Grecs appelaient techniquement un cube, et même chez eux le mot cuber désignait l’action de jouer aux dés. Si c’est du salpêtre, on obtiendra des tiges ou baguettes allongées ayant quatre côtés plats, et terminées par deux bouts sans pointes. Le sucre prendra la forme connue sous le nom de sucre candi, et qui se rapporte à un cube écrasé dans lequel les faces sont posées obliquement l’une sur l’autre. Enfin l’alun offrira en tout sens une double pointe carrée, comme si, prenant une petite règle carrée, on lui faisait à l’un des bouts une pointe formée de quatre biseaux aboutissant à un même point. Cette