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livrés à la circulation, celui de la rive droite en 1839 et celui de la rive gauche en 1840.

Ces deux lignes, comme celle de Saint-Germain, n’étaient que des chemins d’agrément, de simples échantillons, et, quoique fort utiles, ces essais ne pouvaient guère servir à résoudre la question de savoir si l’exploitation commerciale des chemins de fer sur une grande échelle était possible dans notre pays. On en pouvait dire autant des petites lignes toutes locales, autorisées sur divers points du territoire, et que nous avons mentionnées au début de la lutte parlementaire de 1837. Les entreprises qui parviennent à se faire jour à la fin de la session de cette même année, après le rejet des grandes lignes, n’impriment point à l’action un caractère plus décisif. Il ne s’agissait en effet que des chemins de Mulhouse à Thann, de Bordeaux à La Teste, d’Épinac au canal du Centre, d’Alais à Beaucaire et aux mines de la Grand’Combe. Pour la première fois en 1838, quand le réseau projeté par le gouvernement eut été repoussé, deux concessions importantes faites à l’industrie privée vont nous faire arriver à une troisième phase de cette histoire commencée par les chemins de la Loire, agrandie par la ligne de Saint-Germain, et qui voit s’ouvrir enfin l’ère des entreprises vraiment industrielles. Ces deux concessions furent celles des chemins de Paris à Orléans et de Paris à Rouen, au Havre et à Dieppe. Quelques autres lignes sont encore autorisées, les lignes de Strasbourg à Baie et de Lille à Dunkerque, puis, un peu plus tard, celles de Montpellier à Nîmes, de Lille et de Valenciennes à la frontière de Belgique, qui sont — les premières accordées à l’industrie particulière, — les secondes exécutées pour le compte de l’état. Mais la plus saillante de toutes les concessions antérieures au régime de 1842, la concession qui doit de préférence attirer les regards, soit à cause des conséquences qu’elle a eues sur le développement de nos voies ferrées, soit à cause des circonstances qui en ont marqué l’exécution, c’est évidemment la ligne de Paris à Orléans. L’autre ligne commerciale, celle de Rouen, dont le tracé suivait les plateaux, fut promptement abandonnée par la compagnie concessionnaire, réduite à entrer en liquidation. L’autorisation accordée ensuite à une seconde société, qui adopta le tracé par la vallée de la Seine, est postérieure de deux ans à la concession du chemin d’Orléans. En outre de son antériorité et de la résistance qu’il sut opposer à la tourmente où périt la première compagnie de Rouen, le chemin d’Orléans avait d’autant plus d’importance, qu’on prévoyait déjà qu’il deviendrait bientôt le support de puissans rameaux et le véritable tronc de toutes les lignes de la France centrale. C’était là une des voies auxquelles on avait le plus anciennement songé.

Concédé d’abord sans aucune aide de la part de l’état, et avec des conditions accessoires très dures, à une société dont M. Casimir Leconte, l’un des administrateurs des messageries royales, était fondateur, ce chemin éprouva à ses débuts, comme celui de Rouen, des embarras provenant et de la méfiance générale qui s’attachait aux voies ferrées, et de fausses mesures prises pour la négociation des titres. Heureusement il se trouva dans la compagnie,