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sa place, on verra que le soleil arrive au moins jusqu’au parallèle qui sur notre terre marque le cercle polaire. Arrivé là, il éclaire et échauffe le pôle de Vénus avec les feux d’un soleil double du nôtre en force, à peu près aussi voisin du pôle que l’est le soleil de notre tête aux plus longs jours de l’été, et de plus qui ne se couche jamais. M. de Humboldt a observé qu’à La Havane, au solstice, le soleil, suspendu sur la tête des habitans pendant plusieurs jours, produit une chaleur supérieure à celle de l’équateur même. Or les circonstances qui accompagnent le solstice dans Vénus sont encore bien plus favorables à l’échauffement de son pôle que ne le sont pour La Havane le soleil tropical de la fin de juillet, puisque pour le pôle de Vénus le soleil ne se couche point.

Il résultera de toutes ces circonstances les saisons et les climats les plus bizarres et les plus excessifs que l’on puisse imaginer. D’abord point de zone tempérée, puisque le soleil arrivera tout près du pôle à chaque solstice. Il fera pour chacun de ces points une saison des pluies comme on en observe sur la Terre, et les glaces et la neige n’auront point le temps de se former au pôle, dont le soleil n’est absent que pendant quatre mois, c’est-à-dire pendant la moitié de l’année de cette planète, qui dure huit mois en tout. Les agitations des vents, des pluies et des orages doivent surpasser tout ce qu’on peut imaginer sur la terre, et les pôles de la planète doivent se montrer de face à la Terre dans sa révolution autour du soleil. Ce ne peut donc être que rarement qu’une atmosphère aussi agitée doit laisser apercevoir les continens et les mers qui sont à la surface de Vénus, dont les jours d’ailleurs ont à peu près la même durée que les nôtres, savoir 23 heures 21 minutes. Tout nous indique donc que les saisons de cette planète ne ressemblent point à celles de la Terre et de Mars, mais que son atmosphère et ses mers subissent une continuelle évaporation et une continuelle précipitation de pluies torrentielles avec des nuages qui ne laissent que rarement apercevoir le noyau géographique de la planète. Il reste à comparer minutieusement ces données théoriques à l’observation.

Que dire des jours et des saisons des trente-sept petites planètes que l’année 1855 nous a laissées en finissant ? Certainement peu de chose. La seule détermination accessible semble devoir être la durée de leur jour. En effet, on a remarqué dans plusieurs de ces minimes fragmens de la création un éclat variable qui provient sans aucun doute de ce qu’elles nous tournent divers côtés inégalement brillans. L’intervalle entre deux éclats ou deux états obscurs de la planète nous donnera donc le temps de la révolution ou le jour de ces pygmées planétaires. Pour faire mieux comprendre cette idée, imaginons un observateur placé dans Jupiter ou dans Mars, et observant de là notre terre pendant plusieurs jours consécutifs. Il est évident que, quand il aura de son côté la partie continentale de la Terre, savoir l’Asie, l’Afrique et l’Europe, notre planète lui paraîtra beaucoup plus illuminée que quand il recevra le reflet de l’Océan-Pacifique, dont les eaux renvoient bien moins de lumière que la terre sèche. Ce que je dis là n’est point une spéculation hasardée. Tout le monde sait que vers la nouvelle lune et après le dernier quartier, époques où le croissant de la lune est très aigu et très étroit, on aperçoit le reste du disque de la lune éclairé d’une