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trouveraient les produits des animaux à demi engraissés, qui constituent en réalité les viandes de deuxième choix. La troisième comprendrait les produits du dépeçage des animaux maigres ou très mal engraissés. Dans cette classe se rangeraient les viandes qui seraient réellement de qualité inférieure, soit qu’elles vinssent des taureaux, des vaches ou des bœufs. Les inspecteurs chargés d’assurer l’exécution de cette partie des règlemens ne s’y tromperaient pas. Non-seulement les caractères extérieurs bien connus des viandes de premier, deuxième et troisième choix seraient des guides certains, mais encore le contrôle facile des prix payés, sur les marchés qui approvisionnent Paris, pour les trois sortes d’animaux dont ils constateraient journellement l’état sur pied, ainsi qu’après le dépeçage, compléterait leur expérience et leur aptitude à vérifier les indications portées à l’étal du boucher.

Cette mesure administrative semble seule permettre d’intéresser directement, par la taxe elle-même, les nourrisseurs à obtenir dans leurs animaux l’état d’engraissement le plus favorable à la qualité de la viande. On peut dire qu’alors les règlemens seraient mieux en harmonie avec les faits réels. Les détaillans ne pourraient se refuser à inscrire sur les produits à vendre l’indication de chacune des trois qualités réglementaires, tandis que les obliger à mettre sur quelques morceaux des étiquettes portant les mots taureau ou vache, ce serait discréditer leur établissement et rendre très difficile le placement des malencontreux produits. Aussi les bouchers se sont-ils sagement abstenus d’offrir au public des viandes sous ces titres. Je ne prétends pas dire qu’ils se soient aussi généralement abstenus de livrer autre chose que du bœuf à leur clientèle. Il ne s’agissait pour eux que de laisser passer à l’abri du soupçon les produits de quinze ou vingt mille vaches annuellement abattues à Paris, et représentant un sixième environ de la consommation totale en animaux de l’espèce bovine.

Quelques agriculteurs ou économistes ont cru possible d’arriver plus facilement au même but en revenant à la disposition ancienne, qui fixait un droit d’octroi égal pour chaque animal de la même espèce. Que l’animal présenté à la barrière fût d’une grande ou d’une petite race, qu’il fût maigre ou gras, il était taxé au même droit, fixé par tête. Sous l’influence d’un pareil régime, il est évident que tous les animaux expédiés vers les villes à octrois de cette nature devaient être de grande race et largement engraissés. Sans doute ce procédé était de beaucoup le plus simple, mais de graves inconvéniens s’y trouvent attachés. D’une part, il encourageait l’engraissement exagéré, qui n’aurait pu être avantageux sans cette prime ou ce profit factice ; d’un autre côté, il tendait à exclure de l’approvisionnement