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ce qui concerne ses rapports avec l’Italie que la politique autrichienne aura à regretter son attitude en 1854 et en 1855. De ce côté, le seul fait de l’accession de la Sardaigne à l’alliance occidentale est un échec, et lorsqu’il faut réparer cet échec, le remède est presque pire que le mal. L’acte qui donne entrée au Piémont dans les conseils des grandes puissances, la considération que lui vaut en Italie cette énergique et intelligente résolution, l’honneur que se font ses soldats à la bataille du 16 août 1855, tout cela met l’Autriche en émoi : elle sent bien que la situation est changée contre elle à l’avantage du drapeau qui représente l’indépendance nationale, et, pour essayer de regagner le terrain qu’elle a perdu, elle signe avec la cour de Rome le dangereux concordat qui commence à produire ses déplorables fruits, non-seulement en Italie, mais dans tous les états de la monarchie autrichienne. De plus, il n’y aurait pas lieu d’être très étonné qu’il ne fallût jusqu’à un certain point savoir gré à l’alliance piémontaise de la vivacité des efforts que l’Autriche a faits dans l’intérêt de la paix, et des engagemens importans qu’elle aurait pris pour le cas où la Russie aurait rejeté les propositions communiquées à Saint-Pétersbourg par le comte Esterhazy. En effet, si la guerre devait continuer, si en s’étendant elle se compliquait, comme cela était presque inévitable, de questions de nationalité, alors quelles perspectives n’ouvrait pas au Piémont la force de ses alliances, et quelle position était faite à l’Autriche! D’un autre côté, si le cabinet de Vienne ne trouvait pas un moyen de s’attribuer un rôle dans l’œuvre de la pacification après n’en avoir joué aucun dans la guerre, il s’exposait à se voir, comme la Prusse, exclu de la négociation, tandis que la Sardaigne aurait figuré à côté des grandes puissances de l’Europe. Quelle humiliation pour l’un, quel triomphe pour l’autre !

Voilà bien des motifs pour croire que l’Autriche, acculée à une situation désormais impossible, sera de toutes les puissances représentées dans les conférences celle qui s’interposera toujours le plus volontiers pour aplanir les difficultés qui pourraient se produire. Après ce qui s’est passé, le plus beau rôle auquel elle puisse aspirer, celui qui peut encore le mieux sauver les apparences, c’est le rôle de pacificateur, et, pour le remplir, elle oubliera les blessures faites à son amour-propre, elle ne gardera aucun ressentiment des reproches mérités qui lui ont été solennellement adressés au mois de juillet dernier à propos du retard qu’elle mettait à remplir ses engagemens, elle ne laissera rien voir du déplaisir qu’a dû lui causer la translation du siège des conférences de Vienne à Paris.

Il n’est pas nécessaire sans doute de démontrer que la Prusse et l’Allemagne proprement dite font des vœux aussi vifs que l’Autriche pour le rétablissement de la paix, et cela pour des raisons