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Couvrit d’un réseau d’or sa chevelure noire,
Et suspendit brillante au funèbre séjour
La lampe qui ne meurt jamais comme l’amour…
Elle vivrait encore, ô vieillard sacrilège,
Savant, si tu n’étais sorti de ton collège !
Mais tu touchais à peine à ce corps surhumain,
Qu’en poussière il tombait indigné sous ta main !
Et par l’art des Gaulois cette lampe allumée,
Sous tes yeux indiscrets s’exhalait en fumée.

V.



Antiquaires, respect à ma tombe ! Pourquoi
Troubler qui ne peut rien emporter avec soi,
Hors quelques vers écrits dans le dernier délire ?
Le poète aujourd’hui n’a plus même une lyre…
Il chante cependant! Loyal dispensateur,
Son vers sacre le bon, flétrit le malfaiteur :
O vers, soyez bénis, vers trempés dans nos larmes !
Arme noble et puissante entre toutes les armes,
Belle arme protectrice, aux champs, dans la cité,
Je te porte toujours vibrante à mon côté !

III.

l’arbre du nord.

Des bois de Lan-Veur 1855.

I.

Ô chêne, tu couvrais notre terre sacrée,
Mais, symbole de sa durée,
L’Avarice te hait : Meurs, roi de la contrée !

Tu veux mille ans et plus, dans ton paisible orgueil,
Pour former les nœuds durs où la hache s’émousse :
L’arbre frêle du Nord plus rapidement pousse.
Chaque avril, un marchand le mesure de l’œil,

Aux fêtes à venir, s’il reste encor des fêtes,
Où trouver, guerriers et poètes.
Le feuillage élégant qui doit ceindre vos têtes ?

Partout le noir sapin aura jeté son deuil ;
Sous cet ombrage froid, plus de fleurs, plus de mousse,
Plus de nid amoureux d’où sort une voix douce,
Mais le murmure sourd de l’arbre du cercueil.