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est de donner une grande impulsion aux travaux d’utilité publique ; or, entre tous ces travaux, les chemins de fer sont aujourd’hui au premier rang dans tous les pays. Pour le Portugal particulièrement, les voies ferrées peuvent avoir une importance considérable, car par elles Lisbonne se rattachera au centre du continent, et pourra devenir un des principaux ports de l’Europe. Il y a quelques années, le gouvernement avait concédé à une compagnie la ligne de Lisbonne à la frontière d’Espagne ; malheureusement cette compagnie a fini par être obligée d’interrompre ses opérations et ses travaux. Il ne faut point trop s’étonner en vérité de ce premier insuccès ; le Portugal subit la loi de tous les pays qui ont leur expérience à faire. Devait-on, sous le coup de cet échec, se décourager et abandonner la pensée de relier la capitale portugaise à l’Espagne ? Le gouvernement ne l’a pas cru. Seulement il y avait deux choses à faire. Il fallait désintéresser la première compagnie concessionnaire et trouver ailleurs les moyens de mener à une meilleure fin le chemin de fer projeté. C’est là le but de deux des projets présentés aux chambres. L’un propose de contracter un emprunt de 3 millions de livres sterling au moyen d’une émission de bons de la dette extérieure ; l’autre est un traité passé avec le crédit mobilier de Paris et des banquiers de Londres pour l’étude de deux grandes lignes ferrées, reliant Lisbonne à Santarem et à Porto, En attendant que ces études soient complétées, et qu’une concession définitive puisse avoir lieu, les fonds de l’emprunt serviront au gouvernement pour désintéresser l’ancienne compagnie et pour activer les travaux qui pourront se faire. Ces deux projets se lient donc essentiellement ; mais si de la construction des chemins de fer il doit résulter dans l’avenir un grand profit pour le pays, en ce moment le service de l’emprunt crée une charge de plus pour le trésor. C’est une difficulté d’un autre genre, à laquelle M. Fontès Pereira de Mello pourvoit en proposant un remaniement d’impôts qui devra accroître les recettes de l’état sans faire peser des charges beaucoup plus lourdes sur les populations. Le ministre des finances supprime des contributions anciennes, régularise diverses sources de produits, établit quelques taxes nouvelles, dont l’une sur le revenu. En outre il propose deux mesures complémentaires qui ont pour but de rendre libre le commerce du savon et d’établir le monopole du tabac au profit de l’état. On ne peut nier assurément l’activité que met le ministre des finances portugais dans son administration. Il est facile de critiquer certains détails de ses projets : ainsi il est bien clair qu’il fait une situation privilégiée à la compagnie qui s’est chargée d’exécuter les études pour la construction des chemins de fer ; mais dans un pays où tout est à faire, le principal est d’agir, de donner l’impulsion et d’ouvrir la voie, cette large voie où la fortune épuisée d’un peuple peut se relever et retrouver son élasticité vigoureuse.

Ch. de Mazade.

Voyage pittoresque en Italie, par M. Paul de Musset[1]. — Le domaine de la littérature des voyages s’est agrandi chez nous depuis quelque temps d’une façon vraiment démesurée, et ce que j’admire, c’est que parmi tant

  1. Deux beaux volumes grand in-8o, avec illustrations, chez Morizot, rue Pavée.