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longs et contractiles, qui servent à l’animal de bras ou de lignes de fond pour saisir, enlacer et tuer la proie qu’ils apportent ensuite à la bouche.

À peine existait-il dans la science quelques observations isolées et incomplètes sur l’appareil reproducteur des méduses, lorsque Saars et Siebold publièrent leurs belles recherches. Le premier, pasteur à Berghem, occupait les loisirs de son ministère en étudiant la riche faune marine des côtes de Norvège. Dès 1829, il avait décrit comme espèces nouvelles, sous les noms de scyphistoma et de strobila, deux polypes voisins des hydres. Plus tard, il reconnut que le second de ces animaux n’est qu’une transformation du premier (1833). Dès 1835, il annonça que le strobila produit de véritables acalèphes par un procédé encore inobservé[1]. De son côté, Siebold, un des naturalistes allemands qui les premiers ont compris toute l’importance des créations marines, distingua nettement les sexes chez les méduses, suivit dans leurs transformations premières les larves qui sortent de l’œuf, et les vit produire devrais polypes[2]. Enfin, en 1841, dans un mémoire aussitôt reproduit dans toutes les langues de l’Europe, Saars coordonna et compléta cette histoire, jusque-là connue seulement par fragmens[3], et que nous allons rapidement esquisser.

L’aurélie rose (médusa aurita), que le travail d’Ehrenberg a rendue presque aussi célèbre que la chenille du saule immortalisée par l’ouvrage de Lyonnet[4], est une belle espèce à ombrelle presque hémisphérique de dix à douze centimètres de diamètre, teintée d’un rose pâle dû aux mailles de son réseau vasculaire, et dont le rebord est garni de tentacules nombreux courts et roussâtres. L’aurélie pond

  1. Beskrivelser og Jaltagelser over nogle mœrkelige eller nye i Havet ved den Bergenske kyst levende Dyr. Un extrait de cet ouvrage a été traduit par M. Gervais dans les Annales d’Anatomie et de Physiologie, 1838.
  2. Beitrœge zur Naturgeschichte der wirbellosen Thiere.
  3. Mémoire sur le Développement de la Médusa aurita et de la Cyanea capillata, dans les Annales des Sciences naturelles, 1841.
  4. Jusqu’à l’apparition de ce travail, publié en 1839 dans les Mémoires de l’Académie de Berlin, l’organisation des méduses était regardée comme extrêmement simple. On croyait que les cavités et les canaux découverts par M. Duméril dès la fin du siècle dernier étaient creusés dans une matière homogène, ne présentant aucun tissu distinct. Oken et ses disciples fondaient une partie de leurs doctrines sur ce fait, accepté sans examen. M. Ehrenberg démontra que dans l’aurélie il existe des tissus, des organes, des appareils parfois très complexes. il fit donc pour notre époque et pour un groupe bien autrement difficile à connaître ce que Lyonnet avait fait pour les insectes, et en sapant un des principaux fondemens de la Philosophie de la nature, il rendit aux sciences naturelles un service signalé. Bien des zoologistes, et en particulier MM. Agassiz, Edwards, Huxley, Will, ont pleinement confirmé le résultat général des recherches du savant berlinois, et pour mon compte j’en ai maintes fois reconnu l’exactitude.