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ces divers motifs à la fois ont-ils influé sur la résolution du ministre hollandais, qui, avec M. Donker Curtius, ministre de la justice, passait pour l’âme du cabinet. Il reste à savoir quelles seront les conséquences de cette retraite, soit que M. van Hall se retire seul, soit que d’autres membres du cabinet suivent son exemple, et que le ministère ait à se recomposer plus complètement. Cet incident ministériel s’est produit au moment où des élections se font en Hollande et deviennent l’événement principal. Toute l’attention publique s’est portée vers ce mouvement électoral, dont l’un des foyers, le plus animé cette fois, a été La Haye, la résidence, comme on la nomme. M. Groen van Prinsterer, l’un des chefs du parti réformé historique ou anti-révolutionnaire et député sortant, avait pour adversaire M. Gevers van Endegeest, libéral modéré. Aucun des deux candidats n’a obtenu la majorité nécessaire, et l’élection devra se faire d’ici à quelques jours par un second tour de scrutin. M. Thorbecke, l’un des hommes politiques considérables de la Hollande, et le chef principal des libéraux, a été réélu à une assez grande majorité à Maestricht. À Sleennyk, M. van Lennep, député sortant, a été remplacé par M. Duymaer van Twist, récemment gouverneur général des Indes Orientales et attendu dans la métropole. En somme, le mouvement des opinions a semblé se prononcer dans le sens libéral. De ces élections et de la récente crise ministérielle pourront dépendre les prochaines combinaisons de la politique hollandaise.

L’histoire politique de l’Espagne depuis deux années n’est qu’une succession de crises intimes, latentes, qui se manifestent de temps à autre par des incidens qui deviennent uniformes en se renouvelant obstinément. C’est l’éternelle histoire d’une assemblée sans direction et d’un pouvoir sans unité. Tout ce qui survient au-delà des Pyrénées peut se réduire à une seule question, celle de l’union ou des dissentimens des deux généraux qui sont au ministère. Espartero et O’Donnell sont-ils d’accord ou sont-ils divisés de nouveau ? C’est là ce qu’il faut toujours se demander, et comme une des lois de la situation singulière des deux chefs du gouvernement de Madrid est de ce pouvoir être d’accord, et de ne pouvoir se séparer sans péril, il s’ensuit qu’on vit sans cesse entre une rupture et un rapprochement. C’est ce qui vient d’arriver encore. Il y a quelques jours à peine, l’union des deux généraux semblait complète. Le duc de la Victoire faisait un voyage à Valladolid, à Saragosse, pour inaugurer les travaux du chemin de fer du nord, et dans cette excursion, semée d’ovations triomphales, il tenait des discours très monarchiques. Il eut même à soutenir, dit-on, une discussion très vive avec un de ses amis les plus dévoués, le général Gurrea, qui, dans une entre vue à Logrorio, voulait l’amener à une politique plus décidée, c’est-à-dire à une rupture avec le général O’Donnell. Espartero repoussait toute idée de scission avec son collègue. Il revenait à Madrid, et dans les cortès il montrait le même esprit à l’occasion d’une discussion relative aux derniers événemens de Valence. Comment donc s’est réveillée la mésintelligence ? À la suite de la révolution de 1854, le général O’Donnell, devenu ministre de la guerre, a fait une large part aux généraux qui s’étaient soulevés avec lui. Le général Ros de Olano a été nommé directeur de l’infanterie de l’armée, le général Dulce directeur de la cavalerie, le général Serrano directeur de l’artillerie. Le général Messina a été placé à la tête d’un autre service. Or l’un