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Il jugea que le mieux était de ne pas innover une fois de plus en matière d’impôts et de s’en tenir à ceux qu’on trouvait en vigueur. C’était un système d’impositions que la constituante avait établi un peu précipitamment, mais en ayant pour se guider dans le tourbillon le désir d’être équitable et la ferme volonté de ménager la liberté des citoyens. On l’avait maintenu depuis avec quelques additions de médiocre importance, et des changemens, relatifs à l’assiette et à la répartition, qu’on ne pouvait qu’approuver, un rapide examen persuada le premier consul qu’en le maniant convenablement, il en retirerait ce qui était indispensable aux besoins de l’état ; il ne restait qu’à améliorer le mécanisme de la pompe aspirante, c’est-à-dire à adopter un bon mode de recouvrement.

Par conséquent la principale masse des rentrées du trésor devait provenir des quatre contributions qui sont dénommées directes, à savoir la contribution foncière, qui était et qui est encore la principale, la contribution personnelle et mobilière, la contribution des patentes, et celle des portes et fenêtres. Cette dernière était une imitation de l’Angleterre, et datait seulement du directoire. On espérait pour l’an VIII 260 millions environ de ces quatre contributions. Les revenus indirects, qui venaient s’y ajouter, étaient fort modiques ; l’assemblée constituante, par une erreur regrettable, avait totalement aboli les impôts sur les boissons, et l’impôt du sel avait succombé sous l’indignation générale provoquée par les vexations dont il était l’occasion. Monsieur, frère du roi, quand il avait, dans l’assemblée des notables, qualifié la gabelle d’infernale, avait exprimé, sans l’exagérer, le sentiment public. Restaient donc les droits de timbre et d’enregistrement, les douanes, les postes, la loterie et un petit droit sur le tabac. Les forêts de l’état devaient aussi offrir des ressources. C’est tout au plus cependant si l’on pouvait, avec toutes ces recettes réunies, espérer d’atteindre 400 millions. Je ne parle pas du droit des barrières sur les routes ; il était spécialement affecté à l’entretien de ces voies de communication, et il n’y suffisait pas. Un maximum de Ï00 millions, sauf les ressources extraordinaires, qu’il n’était pas facile d’imaginer de manière à ne pas obérer les contribuables, voilà tout ce dont on pouvait disposer pour ériger une administration et un gouvernement, faire le service d’une dette publique qui, malgré la réduction des deux tiers, restait considérable, et soutenir une guerre acharnée sur terre et sur mer ! Il est vrai que dans les budgets de ce temps-là les frais de perception sont laissés à l’écart, et ils représentaient alors une somme de plus de 100 millions. Le grand homme dans les mains duquel, selon l’expression de M. Mollien, tous les pouvoirs étaient d’eux-mêmes venus se réfugier sut trouver dans dès revenus aussi modiques le