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bonne en soi. Après avoir traversé une multitude d’amendemens, dont quelques-uns furent adoptés, le bill passa enfin dans les deux chambres ; mais c’était une lutte engagée, non une institution fondée. Au lieu de tomber quand le bill fut voté, la résistance des divers opposans, catholiques et protestans, Irlandais et Anglais, alla s’envenimant, et se compliqua de l’intervention du pape dans les résolutions des évêques d’Irlande sur la conduite qu’ils avaient à tenir envers les nouveaux établissemens. Sir Robert Peel n’avait pas mesuré la grandeur du problème auquel il avait touché.

XIII.

Il dénoua plus heureusement, dans le cours de ces deux sessions, plusieurs questions qui pesaient depuis longtemps sur le gouvernement anglais, comme des griefs à redresser ou des progrès à accomplir. Il fit abroger l’injuste loi qui attribuait à des commissaires exclusivement protestans le droit d’autoriser ou d’interdire les dons et legs faits aux divers établissemens catholiques ; ils furent remplacés par une commission mixte où des catholiques prirent place en nombre égal. Les dissidens protestans, entre autres les unitaires, étaient inquiétés dans la possession de chapelles et d’autres propriétés qui donnaient lieu à d’obscures questions sur les intentions religieuses des fondateurs comparées aux doctrines des occupans ; les subtilités légales et les animosités théologiques prolongeaient et envenimaient sans mesure ces affaires. Malgré d’âpres résistances, sir Robert Peel et le chancelier lord Lyndhurst y mirent un terme en faisant passer un bill qui confirmait dans la pleine propriété des établissemens de ce genre toute société religieuse en possession depuis vingt ans. La validité des mariages des presbytériens établis en grand nombre dans le nord de l’Irlande était sujette à de grands embarras ; un bill franchement accepté par l’église épiscopale d’Irlande les fit complètement cesser. La loi des pauvres reçut d’importantes et difficiles améliorations. La nécessité d’un serment chrétien excluait les juifs de certaines fonctions municipales ; elle fut abolie. Le cabinet ne réussit pas aussi bien dans la réforme des cours ecclésiastiques et du régime municipal en Irlande ; sur ces deux points, il fut obligé de laisser tomber les bills qu’il avait présentés. Placé entre les adversaires et les partisans systématiques des innovations, quand il n’avait pas, à l’appui de celles qu’il proposait, ou une nécessité impérieuse ou cette évidence surabondante devant laquelle les préjugés et les passions se taisent quelquefois, il courait grand risque d’échouer, ou pour avoir trop tenté, ou pour n’avoir pas assez fait. Mais ces échecs ne décourageaient pas sir Robert Peel ; c’était un des traits