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Williamson, chargé de cette troisième section de la route méridionale, a visité les cols de la Sierra-Nevada et ceux de la chaîne côtière, et en a trouvé plusieurs praticables pour un chemin de fer. On voit néanmoins du premier coup combien la solution proposée est peu satisfaisante, puisqu’elle oblige à franchir deux foison sens contraire la chaîne côtière avant d’arriver à la sierra californienne. Cet immense et laborieux détour ôte à la route méridionale le privilège qu’elle aurait eu d’être la plus courte, si on avait pu l’arrêter à San-Diego. On a bien songé à suivre une ligne directe qui traverserait la région comprise entre le Rio-Colorado et le col le plus favorable de la Sierra-Nevada; mais le lieutenant Williamson s’est assuré qu’au nord des déserts du Colorado, la contrée devient très accidentée et que des chaînes inexplorées y forment une barrière infranchissable entre le Colorado et la Sierra-Nevada. Tout ce pays n’est qu’un vaste désert, aride et montueux, où les Indiens eux-mêmes ne vont jamais s’aventurer. Il n’y tombe de pluie qu’une seule fois pendant toute l’année, vers le mois d’août.

Le simple exposé des travaux de Williamson, Parke et Pope rend très difficile à comprendre la préférence que les officiers du bureau topographique américain accordent à la ligne du 32e degré de latitude. Le seul avantage qu’elle possède sur les autres est que les pentes y sont partout d’une grande douceur, et que, sur de très longues distances, le sol est si uni, si compacte, qu’on pourrait presque sans aucune préparation y placer les traverses et les rails; mais cet avantage ne peut être mis en balance avec des inconvéniens de la nature la plus grave. L’eau et le bois, élémens indispensables à la construction et à l’exploitation d’un chemin de fer, font complètement défaut sur presque tout le parcours, dans la monotone plaine du Llano-Estacado, dans les vastes bassins qui séparent le Rio-Grande du Gila, dans le désert du Colorado. Les progrès qu’on a faits depuis quelques années dans l’établissement des voies ferrées sont tels qu’on ne doit jamais désespérer de venir à bout d’obstacles extérieurs tenant à la configuration ou à la nature du sol; mais rien ne peut suppléer au manque d’eau, de bois et de combustible. Pour suivre la ligne du 32e degré, il faudrait amener les traverses à des distances énormes, chercher le combustible jusque dans la vallée du Mississipi, et du côté de l’Océan-Pacifique, jusqu’à l’île Vancouver : le chemin de fer ne pourrait avancer qu’en transportant tout avec lui.

Pour obvier au manque d’eau sur une si grande partie de la route, on propose, sur la foi du géologue américain qui accompagna les expéditions, de percer des puits artésiens de distance en distance dans les parties les plus arides du chemin. On espère former ainsi