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a lieu, suivant les localités et la température, depuis le mois de mai jusqu’au mois de juillet ou d’août.

Lorsque la température, après s’être maintenue assez belle en mai et juin, s’élève tout à coup, il importe de surveiller soigneusement les vignes, car les premiers germes inaperçus pourraient se développer si rapidement, que l’épiderme du raisin serait fortement attaqué en quelques jours, et qu’alors le soufrage, en arrêtant les progrès ultérieurs du mal, ne pourrait empêcher les fâcheux effets produits de se manifester ultérieurement[1]. Ce sont les cépages les plus délicats dans chaque localité (le frankenthal, le chasselas, le carignan, le pique-poule, les terrets, etc., etc.) qu’il faut surtout examiner attentivement, car la cryptogame parasite, s’y développant beaucoup plus vite, arrive promptement à l’état de fructification et produit des myriades de séminules qui propagent la maladie sur les autres ceps. Trois soufrages ordinairement et souvent quatre, avant, pendant et après la floraison de la vigne[2], sont nécessaires pour arrêter à chaque reprise les nouveaux progrès de la végétation parasite, car il paraît évident que si le soufre attaque et détruit le mycélium et les tigelles de l’oïdium, il reste presque toujours sans action sensible sur une partie des spores ou séminules de la plante parasite. Aussi ne doit-on pas s’étonner que dans les serres elles-mêmes, comme sur les treilles et dans les vignobles, la maladie reparaisse après avoir été complètement arrêtée par le soufre l’année précédente. En tout cas, on ne doit pas épargner la fleur de soufre; ce serait une mauvaise économie, qui compromettrait le succès de l’opération : il faut que les particules de la poussière jaune recouvrent toute la surface des pampres.

Ce n’est que huit ou dix jours après l’application du soufre, surtout s’il survient alors une pluie légère, que l’on peut bien en constater l’effet utile. On voit une teinte verte prononcée succéder à la nuance d’un vert jaunâtre qui caractérisait sur les feuilles les premiers effets du mal. Les circonstances les plus favorables se rencontrent lorsque le soleil est chaud, lorsqu’un vent léger aide à l’égale répartition du soufre, et que les superficies de la vigne sont sèches. Son action est alors d’autant plus vive que sa volatilisation partielle là où il se dépose augmente les chances d’établir et de multiplier ses points

  1. Il est à craindre qu’une partie des viticulteurs du Bordelais, des environs de Versailles, Alfort, Verrières, Château-Thierry, et même de la Toscane, ne se trouvent pris en défaut par une invasion subite, quoique tardive, de ce genre, qui vient de frapper leurs treilles et leurs vignobles et de faire de grands progrès avant que chacun ait pu se trouver en mesure de la combattre.
  2. M. Marès considère comme les plus efficaces les soufrages opérés au moment de la floraison. Il semble même que la floraison de la vigne soit particulièrement favorisée par la présence du soufre.