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LE ROMAN


DE LA VIE DES NOIRS


EN AMÉRIQUE





DRED, by Mrs HARRIET BEECHER STOWE.





Les peuples, comme les individus, subissent la loi de l’expiation, et portent la peine des crimes qu’ils commettent ou qu’ils permettent. Ce que l’Irlande a si longtemps été pour l’Angleterre, l’esclavage l’est aujourd’hui pour l’Amérique ; c’est le mal qui porte avec lui-même son châtiment. La question de l’esclavage est maintenant devenue pour les États-Unis un élément incessant de guerre civile, en attendant la guerre servile. De même que l’homme est venu au monde avec la tache du péché originel, ainsi la république américaine est née avec le cancer de l’esclavage, qui n’a fait que se développer et menace d’envahir le corps entier. Les plus grands hommes, les plus grands citoyens de l’Union, comprenant bien qu’ils ne pouvaient guérir cette plaie, ont cherché à la restreindre, à la cerner, à la parquer dans la partie malade. Vains efforts ! la gangrène ne peut pas s’arrêter ; il est de sa nature de s’étendre, c’est la tache d’huile. La question de l’esclavage, longtemps étouffée sous la patriotique conspiration du silence, se fait jour maintenant par toutes les voies de la presse, de la tribune et de la chaire. Il fut un temps où la seule menace d’une rupture possible de l’Union aurait suffi pour faire taire toute discussion ; ce temps n’est plus, et les états libres, qui depuis