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peuple navigateur qui, fort de ses institutions et de ses libertés, sut étendre sa main sur toutes les terres et toutes les mers. Un voyageur anglais qui avait visité les Pays-Bas au commencement du XVIIe siècle résume ainsi ses observations : « J’ai vu un peuple dont le territoire restreint et inondé ne produit guère naturellement que de l’herbe, mais qui, par son industrie, a su s’approprier en abondance les fruits du monde entier. »

À côté de la compagnie des Indes-Orientales florissait la compagnie des Indes-Occidentales. L’établissement de cette institution ne remonte qu’à 1621 : elle fut dissoute en 1674 et rétablie, par octroi des états-généraux, le 20 septembre de la même année. Cette société regardait du côté du Nouveau-Monde. La riche moisson que les découvertes des navigateurs faisaient éclore comme par enchantement dans les solitudes de l’Atlantique laissa tomber quelques gerbes entre les mains des vigoureux marins hollandais. Les principales colonies que possédait la compagnie des Indes-Occidentales étaient Surinam, Curaçao, Aruba et Bon-Aire. Les états de Zélande, auxquels la colonie de Surinam appartenait d’abord, en transportèrent la possession à la nouvelle société, qui, n’étant pas en état d’y envoyer elle-même tous les secours nécessaires, en céda un tiers aux magistrats d’Amsterdam et un autre tiers à M. d’Aarsen, seigneur de Sommelsdyk. Les productions de cette colonie étaient le sucre, le café, le cacao, le coton et l’indigo.

Outre ses établissemens en Amérique, la compagnie des Indes-Occidentales en possédait quelques autres en Afrique. Près du Cap-Vert, dans la petite île de Gorée, les forts de Goor et de Nassau lui étaient d’une grande importance pour protéger le commerce du Cap. Sur la côte d’Or, elle tenait Saint-George-de-las-Minas et Nassau, elle commandait les forts d’Achem, de Darmbo, d’Acaro, de Sanca et de Benden. Cette compagnie traitait avec les indigènes depuis la côte d’Or jusqu’à la région des Cafres, dans les royaumes d’Aden, de Bénin, de Congo et d’Angora[1]. Elle ne permettait à personne de trafiquer sur les côtes de l’Afrique. En Amérique, au contraire, la compagnie ne faisait presque point d’expéditions pour son compte ; elle autorisait tout le monde à pratiquer le commerce des Indes-Occidentales, pourvu qu’on lui payât certains droits ; mais tous les navires, sans exception, étaient obligés de revenir en Hollande avec leur cargaison de retour. La direction était partagée entre cinq chambres, dont l’administration était confiée à cinquante-sept directeurs. Les Espagnols appelaient la Hollande l’araignée des mers. La métaphore est juste, si l’on veut dire qu’avec un très petit

  1. Les principales marchandises qu’elle tirait de ces régions étaient de l’or, de l’ivoire, des cuirs, des gommes, du riz, et, il faut bien le dire, des esclaves.