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intactes, et leurs empreintes fossiles nous font connaître la végétation de la Grèce ancienne ; les autres se sont changées en un combustible charbonneux nommé lignite. Ainsi la Providence a fait servir les végétaux du vieux monde à former les charbons dont le génie de l’homme tire un si grand parti. Les combustibles de la Grèce ont déjà été mis à profit : ils ont été exploités à Coumi, dans le nord de l’Attique ; ils le sont encore dans l’île d’Eubée, et pourraient l’être dans plusieurs autres pays. Malheureusement ils laissent trop de cendre, et ils sont bien loin de donner la même somme de chaleur que la houille. Sur des paquebots ou des locomotives, ces combustibles seraient d’un emploi difficile ; mais dans les machines fixes, où l’encombrement n’a point de graves inconvéniens, ils seraient d’un bon emploi, et remplaceraient la houille, dont l’Attique paraît complètement dépourvue.

Si les eaux des lacs se remplirent de poissons et de mollusques, si la terre se couvrit d’une riche végétation, les quadrupèdes furent aussi appelés à peupler la Grèce ancienne. Nous avons déjà donné l’énumération de ces animaux : c’étaient des hipparions et des antilopes qui paissaient l’herbe des prairies, des girafes, des mastodontes, qui se nourrissaient du feuillage des arbres. On voyait aussi des singes, des macrothériums, des hyènes, des civettes, des porcs-épics, des sangliers, des rhinocéros, etc. On n’a point encore trouvé d’indices de reptiles, mais on a recueilli des os de gallinacés. À ces oiseaux s’en joignaient d’autres sans doute ; leur chant se mêlait aux cris divers des nombreux quadrupèdes : une seule voix manquait, la voix de l’homme.

Les quadrupèdes enfouis à Pikermi, les plantes changées en lignite à Coumi, les mollusques fossilisés près de la Ferme-du-Roi, à Oropo, à Marcopoulo, ont-ils appartenu à la même époque ? Je n’ose trancher cette question ; mais ce qu’on peut assurer, c’est qu’ils ont dû vivre après l’époque des grands soulèvemens pyrénéens.

Il n’est pas contestable que dans la dernière phase de la période tertiaire il y ait eu un affaissement général du sol de la Grèce vers le sud, car on voit dans cette contrée de nombreux dépôts, pétris de fossiles marins, qui attestent cet affaissement. Serait-ce à ce phénomène qu’il faudrait attribuer la destruction des êtres enfouis à Pikermi ? Peut-être plusieurs des animaux qui peuplaient le continent purent fuir l’invasion de la mer, et se réfugièrent dans les parties non affaissées du nord de la Grèce, spécialement sur le mont Pentélique, première montagne qui fait face à la plaine d’Athènes. Toutefois ils n’y vécurent pas longtemps, resserrés qu’ils étaient par les limites de leur nouveau domaine, et privés d’une alimentation suffisante. Je pourrais répéter, au sujet de ces animaux, ce qu’Ovide a dit pour un déluge beaucoup moins ancien, le déluge